D'intenses combats ont éclaté vendredi autour de Bentiu, dans le nord du Soudan du Sud, malgré les menaces de sanctions brandies par l'ONU en cas de poursuite de ce conflit entré dans son 9e mois, ont rapporté les belligérants, des travailleurs humanitaires et un diplomate.

Lul Ruai Koang, un porte-parole militaire de la rébellion dirigée par l'ancien vice-président sud-soudanais, a fait état dans la matinée de combats au sud et à l'est de Bentiu, capitale de l'État pétrolier d'Unité, ainsi que dans la localité d'Ayod, dans l'État oriental du Jonglei.

Ces combats marquent le début «d'une offensive gouvernementale attendue depuis longtemps», a-t-il affirmé.

«Il y a toujours des combats» autour de Bentiu, a indiqué à l'AFP, en milieu d'après-midi, le lieutenant-colonel Joseph Marier Samuel, un porte-parole de l'armée sud-soudanaise. «Il s'agit de la poursuite de la violation de l'accord de cessez-le-feu», a-t-il ajouté, assurant que les forces sud-soudanaises avaient répondu en état de «légitime défense».

Aucun des deux accords de cessez-le-feu, signés mi-janvier et début mai par les belligérants, n'a jamais été réellement appliqué et les deux parties s'accusent mutuellement de violations.

Ce porte-parole de l'armée a également affirmé que les rebelles avaient attaqué les positions gouvernementales à l'aube à Ayod, mais qu'ils avaient été repoussés et que les combats étaient terminés depuis la matinée.

«Nous avons entendu d'intenses tirs d'artillerie éclater ce (vendredi) matin», a confirmé à l'AFP Timothy Ngyuai, employé de l'ONG Care à Bentiu, expliquant que le personnel s'était réfugié dans des abris avant de reprendre le travail, les combats semblant s'éloigner.

L'ambassadeur britannique à Juba, Ian Hughes, a confirmé ces affrontements autour de Bentiu, qualifiant la situation de «décevante», deux jours après une visite des représentants des 15 pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU au Soudan du Sud.

Ces derniers se sont entretenus avec les chefs des deux camps, le président sud-soudanais Salva Kiir et M. Machar, leur rappelant fermement les risques de sanctions pesant sur eux.

«La situation est déjà suffisamment désespérée», a estimé M. Hughes, «les chefs doivent contrôler leurs troupes».

Des milliers, voire des dizaines de milliers de personnes ont été tuées et plus de 1,5 million chassées de chez elles depuis que le conflit a éclaté, le 15 décembre 2013, au sein de l'armée sud-soudanaise, minée par des antagonismes politico-ethniques exacerbés par l'âpre rivalité entre Salva Kiir et Riek Machar à la tête du régime.

Des milices tribales se sont jointes aux combats, accompagnés de massacres et d'atrocités sur des bases ethniques, qui ont poussé au bord de la famine la plus jeune nation du monde, devenue indépendante en juillet 2011 à l'issue de décennies de guerre contre Khartoum.

L'État d'Unité est depuis le début du conflit l'un des principaux foyers de combats. Bentiu, qui a changé plusieurs fois de mains, a été le théâtre de terribles massacres ethniques et est largement détruite et désertée.

À l'intérieur de la base de l'ONU à Bentiu, inondée en raison des pluies saisonnières, plus de 40 000 personnes fuyant les violences, mais aussi de plus en plus poussées par le manque de nourriture, s'entassent avec de l'eau à hauteur des genoux, dans des conditions qualifiées «d'épouvantables» par Médecins sans Frontières (MSF).

Un tiers des réfugiés de la base sont des enfants de moins de cinq ans dont l'un meurt chaque jour, selon MSF.

Environ 100 000 personnes ont trouvé refuge dans les bases de l'ONU à travers le Soudan du Sud et craignent toujours d'en sortir de peur d'être massacrées pour leur appartenance ethnique.

Des pourparlers ouverts en janvier à Addis Abeba sont restés infructueux. L'organisation est-africaine qui assure la médiation s'est récemment dite prête également à prendre des sanctions.