La seconde boîte noire d'un avion d'Air Algérie qui s'est écrasé dans le nord du Mali a été retrouvée samedi par des experts de l'ONU sur le site de cette catastrophe aérienne, où le travail des enquêteurs s'annonce délicat.

Cette boîte noire du vol AH5017 a été récupérée par les experts de la Mission de l'ONU au Mali (Minusma) déployés dans la zone de Gossi, à environ 100 km de Gao (nord-est du Mali), où l'avion s'est écrasé jeudi pour des raisons encore inconnues.

Selon la Minusma, la seconde boîte noire  - comme la première récupérée vendredi par des militaires français - sera acheminée vers Gao, ville dans laquelle est basé «le centre de gestion tactique des opérations», associant l'armée française présente depuis un an et demi au Mali, ce pays et la Minusma.

Dépêchés par la France, une vingtaine de gendarmes et de policiers ainsi qu'une équipe Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA, dépendant du ministère français des Transports) sont arrivés samedi à Gao, d'où ils se sont rendus sur le site du drame.

Sur place, «leur travail technique consiste à recueillir le maximum d'informations» sur l'avion et l'accident, a expliqué à l'AFP à Paris Rémi Jouty, directeur du BEA.

Une fois terminé ce travail sur place - ce qui devrait prendre «quelques jours» -, les enquêteurs se concentreront sur «l'exploitation des enregistreurs et la collecte d'autres données, de contrôle aérien, les données météo» notamment a-t-il ajouté. Selon lui, à l'heure actuelle, «il est trop tôt pour faire la moindre hypothèse» sur l'origine de l'accident.

Si ses causes demeuraient inconnues samedi soir, plusieurs spécialistes ont évoqué les mauvaises conditions météorologiques.

L'avion d'Air Algérie, un McDonnell Douglas MD-83 loué auprès de la société espagnole SwiftAir, était parti de Ouagadougou pour Alger dans la nuit de mercredi à jeudi et s'est écrasé 50 minutes après avoir décollé.

Aucune des 118 personnes à son bord - 112 passagers (54 Français, 23 Burkinabè, huit Libanais, six Algériens et des ressortissants d'autres pays) et les six membres, espagnols, de l'équipage - n'a survécu.

En France, où les drapeaux seront mis en berne pour trois jours à partir de lundi en signe de deuil, des familles des victimes françaises ont été reçues par le président François Hollande.

M. Hollande a promis de «faire en sorte que les équipes qui sont sur place puissent, le temps nécessaire, faire le travail de regroupement des corps et d'identification». Puis, «lorsque ce sera possible, tous les corps seront ramenés en France. Je dis bien tous les corps de tous les passagers de ce vol», a-t-il ajouté.

Récupérer des corps «pour pouvoir commencer à faire le deuil»

Au Burkina Faso, des proches de victimes de diverses nationalités ont aussi été reçus par le président Blaise Compaoré, qui a annoncé l'ouverture, dans la soirée de jeudi, par le procureur de Ouagadougou d'une enquête judiciaire pour rechercher les causes de la catastrophe.

En plus d'être désireuse de connaître la vérité, «chaque famille espère avoir les restes» des siens, «pour pouvoir commencer à faire le deuil», a expliqué à l'AFP après l'audience Mme Alima Traoré, une Burkinabè.

Pierre Hage, un Libanais, a demandé au président de l'«aider à retrouver (ses) parents, que ce soit en entier ou partiellement».

Des souhaits difficilement réalisables, d'après le chef d'état-major particulier du président burkinabè, le général Gilbert Diendiéré.

«Je ne pense pas qu'on puisse reconstituer les corps (...), ils ont été éparpillés, dispersés. Je ne suis pas sûr qu'on puisse (en) retrouver certains», a-t-il prévenu.

A défaut de pouvoir retrouver les corps, «certaines familles ont souhaité (...) qu'au moins on puisse avoir les cendres», a ajouté le général.

Samedi matin, des proches de victimes et des représentants de leurs pays d'origine ont pu se rendre en hélicoptère sur le site de la tragédie.

Parmi eux, figurait le Burkinabè Eugène Somda qui a perdu «deux de (ses) frères, (sa) belle-soeur» ainsi qu'une amie. «Maintenant, je sais où sont mes frères. C'est très important pour moi de savoir que cet endroit est leur tombe», a-t-il déclaré.

Proches des victimes et experts espèrent trouver des réponses dans les boîtes noires, qui enregistrent les paramètres de vol et les conversations dans la cabine de pilotage.

Dans leur travail, les enquêteurs risquent cependant d'être confrontés à d'autres défis : la saison des pluies actuellement en cours pourrait encore aggraver les difficultés d'accès au site de la catastrophe, dans une région instable au plan sécuritaire.

Des groupes jihadistes ont occupé pendant plusieurs mois entre 2012 et début 2013 le nord du Mali, d'où ils ont en grande partie été chassés par une opération militaire internationale en cours depuis un an et demi, mais ils demeurent dans la région, y déclenchant des attaques meurtrières.