Le chef du groupe islamiste armé nigérian Boko Haram, Abubakar Shekau, a revendiqué deux attentats perpétrés le même jour le mois dernier à Abuja et Lagos dans une nouvelle vidéo visionnée par l'AFP dimanche.

Dans cette séquence de 16 minutes, Shekau proclame aussi son soutien à d'autres mouvements islamistes : l'État islamique (EI) qui contrôle une partie de la Syrie et de l'Irak, Al-Qaïda et les talibans afghans.

Et il se moque de la campagne «Bring Back Our Girls» (Ramenez-nous nos filles») pour la libération de plus de 200 lycéennes enlevées par Boko Haram le 14 avril à Chibok, dans le nord-est du Nigeria.

Une précédente vidéo diffusée le 12 mai montrant une centaine des jeunes filles kidnappées avait attiré l'attention du monde entier sur la sanglante insurrection de Boko Haram qui dure depuis cinq ans et a fait des milliers de morts, essentiellement dans le nord-est d'où est parti le mouvement.

«C'est nous qui avons fait exploser la bombe à Abuja l'immonde», déclare Shekau dans la vidéo.

Cet attentat contre un centre commercial de la capitale fédérale nigériane avait fait 22 morts le 25 juin. Il s'agissait du troisième attentat en trois mois à frapper Abuja.

Le même jour, une explosion s'était produite à Lagos dans la zone portuaire, près des réserves de carburant. Les autorités l'avaient qualifiée d'accidentelle, mais une enquête de l'AFP a établi qu'il s'agissait d'un attentat. Aucun bilan n'a été publié.

«Une bombe a explosé à Lagos. C'est moi qui ai donné l'ordre (à un homme) d'y aller et de la faire exploser», déclare Shekau, qui apparaît en plein air entouré d'une quinzaine d'hommes en armes, masqués, debout devant deux véhicules blindés et deux pick-up.

«Vous avez dit que c'était un incendie accidentel. Vous pouvez vous cacher devant le peuple, mais pas devant Allah», ajoute-t-il.

Il s'agirait du premier attentat de Boko Haram dans la capitale économique nigériane, ce qui pourrait avoir de lourdes conséquences économiques et politiques.

Le gouvernement a indiqué que l'enquête était toujours en cours.

Selon des experts cependant l'attaque a sans doute été menée par une cellule de militants locaux, sans lien étroit avec Boko Haram, qui est surtout implanté dans le nord-est musulman du Nigeria, à l'opposé de Lagos, située au sud-ouest, dans une région chrétienne.

Sa tête mise à prix: 7 millions de dollars

Abubakar Shekau aurait déjà revendiqué des attaques qu'il n'avait pas directement ordonnées. Dans la vidéo, il se trompe sur le nom du gouverneur de l'État de Lagos, le confondant avec celui de l'État d'Edo.

Shekau a parfois semblé déconnecté, voire déséquilibré dans ses vidéos, menaçant l'ancienne Première ministre britannique Margaret Thatcher plusieurs mois après sa mort, ou encore le défunt pape Jean Paul II.

Le chef de Boko Haram affirme encore, toujours dans la vidéo de dimanche, que ses militants sont responsables du double attentat à la voiture piégée qui a fait 118 morts sur un marché en mai à Jos (centre) - le plus meurtrier jamais perpétré au Nigeria - et d'une attaque en juin contre une université de Kano (nord) qui a fait huit morts.

Shekau, déclaré «terroriste à l'échelle mondiale» par les États-Unis qui ont mis sa tête à prix pour 7 millions de dollars, proclame également dans la vidéo son soutien à des chefs des principaux mouvements islamistes dans le monde qu'il appelle ses «frères».

«Mes frères, qu'Allah vous protège», dit Shekau, mentionnant le chef de l'État islamique Abou Bakr Al-Baghdadi, le chef d'Al-Qaïda Ayman Al-Zawahiri et celui des talibans afghans, le mollah Omar.

Parlant en anglais, Shekau reprend le slogan «Bring Back Our Girls», ajoutant «Bring Back our army» (ramenez notre armée), une allusion possible à une proposition d'échange entre les jeunes filles otages contre des militants de Boko Haram emprisonnés.

Il dit qu'il continuera à poser «un énorme problème» à l'Occident et au Nigeria.

Par ailleurs, la jeune Pakistanaise Malala Yousafzai, qui a survécu de justesse à une tentative d'assassinat des talibans, a rencontré dimanche à Abuja des parents des lycéennes enlevées et des représentants du mouvement actif pour leur libération.

Malala, qui milite pour l'éducation des filles dans le monde, doit s'entretenir lundi avec le président Goodluck Jonathan.