Le président somalien a limogé mercredi les chefs de la police et des services de renseignements face à la multiplication des attaques des islamistes shebab, dans la capitale et jusque dans des pays de la région.

Les islamistes affiliés à Al-Qaïda ont mené mardi soir un assaut spectaculaire contre le palais présidentiel de Mogadiscio, pour la deuxième fois depuis le début de l'année.

Ils démontraient ainsi leur capacité à infiltrer la capitale et à frapper les centres ultra-protégés du régime soutenu par la communauté internationale.

Le président Hassan Cheikh Mohamud, qui ne se trouvait pas sur place lors de l'attaque, s'est voulu ferme mercredi face aux shebab, en prononçant un discours à quelques pas de l'épave de la voiture piégée utilisée par les assaillants.

«Je suis ici pour rester, si Dieu le veut [...]. Je leur dis : "Vous ne nous tuerez pas, et vous ne détruirez pas non plus notre moral"», a-t-il lancé.

Il a aussi remercié la force de l'Union africaine dans le pays - l'Amisom, composée de 22 000 hommes - pour avoir aidé à combattre le commando et pour avoir assuré sa propre sécurité.

Même s'il a jugé que l'attaque shebab s'était soldée par un «échec», deux des plus hauts responsables de la sécurité du pays ont été limogés.

«Les chefs de la police et des services de renseignements ont été tous deux remplacés», a déclaré Mustafa Duhulow, le ministre de l'Information.

En outre, Khalif Ahmed Ereg, un ancien patron des renseignements, est désormais ministre de la Sécurité nationale.

Le poste était vacant depuis la démission de son prédécesseur en avril, à la suite d'une attaque-suicide contre le Parlement.

Radicalisés et bien entraînés

Dans leurs dernières attaques, les shebab, pourtant chassés de Mogadiscio depuis 2011, ont réussi à frapper des hauts lieux du pouvoir et du système de sécurité.

Si l'Amisom a lancé une nouvelle offensive en mars, reprenant plusieurs localités aux shebab à travers le pays, les insurgés ont le plus souvent préféré éviter le combat, et subi peu de pertes.

Ils bénéficient toujours de «réservoirs importants de soutien financier et idéologique», a averti International Crisis Group (ICG) dans un rapport publié récemment.

«La connexion de longue date entre la direction actuelle des shebab et Al-Qaïda va probablement se renforcer», selon le centre de réflexions.

Le groupe islamiste recourt à des «individus radicalisés et bien entraînés» pour commettre «des assassinats et des attaques terroristes dans les zones urbaines, et de plus en plus dans des pays voisins, au Kenya surtout», souligne ICG.

Un porte-parole des shebab a confirmé que son groupe était derrière l'assaut de mardi soir. Il a affirmé que les combattants avaient réussi à pénétrer dans le palais présidentiel lui-même, situé dans l'enceinte d'un vaste complexe fortifié, la «Villa Somalia».

Mais le gouvernement a opposé un démenti, assurant que les hommes armés avaient été tués près de l'entrée du complexe ultra-protégé.

«Sur les quatre assaillants, trois ont été tués dans le stationnement (à l'extérieur) et un a été capturé», a déclaré le ministre de l'Information.

Un responsable de la sécurité avait cependant affirmé qu'au moins neuf combattants étaient impliqués dans l'attaque et avaient trouvé la mort. Ils portaient des uniformes de l'armée somalienne.

Des spécialistes ont fait exploser plusieurs engins explosifs, «notamment une veste bourrée d'explosifs qu'un assaillant portait et qui n'avait pas réussi à exploser», a ajouté le ministre.

Le palais présidentiel avait déjà été ciblé en février. Des shebab, vêtus d'uniformes de l'armée, avaient réussi à entrer dans la «Villa Somalia», forçant le passage avec une voiture piégée avant d'être tués par les services de sécurité.

Expulsés de la capitale en 2011 par l'Amisom, les shebab contrôlent toujours de larges zones rurales de la Somalie, plongée dans la guerre civile en 1991.

Ils ont aussi perpétré une série d'attaques dans des pays de la région engagés au sein de l'Amisom, comme l'Ouganda, Djibouti et surtout le Kenya.

Après avoir visé Nairobi et la grande cité portuaire Mombasa, les insurgés ont revendiqué depuis la mi-juin plusieurs tueries près de l'archipel touristique de Lamu, sur la côte kényane au bord de l'océan Indien.