Une trentaine de personnes ont été tuées et plus de 60 femmes enlevées dans de nouvelles attaques attribuées au groupe islamiste armé Boko Haram dans le nord-est du Nigeria, deux mois après le retentissant kidnapping de plus de 200 adolescentes dont on ignore toujours le sort.

Ces tueries et enlèvements ont eu lieu au cours d'une série d'attaques réparties sur plusieurs jours la semaine dernière dans le village de Kummabza, dans le district de Damboa, dans l'Etat de Borno, ont déclaré mardi des responsables locaux.

Le quartier général de la Défense nationale nigériane a affirmé lundi soir sur Twitter qu'il cherchait «à confirmer les nombreuses informations faisant état d'enlèvements de jeunes filles dans le Borno».

L'armée n'a pas pu être contactée par l'AFP mardi, mais, selon un responsable de Damboa qui a souhaité rester anonyme, «plus de 60 femmes ont été attaquées et emmenées de force par les terroristes».

«Le chef du village de Kummabza nous a dit que, parmi elles, il y a des enfants âgés de 3 à 12 ans», a-t-il ajouté.

Le chef d'une milice locale, Aji Khalil, a pour sa part confirmé que «plus de 60 femmes ont été enlevées par des terroristes de Boko Haram».

Un autre habitant réfugié à Maiduguri, capitale de l'État de Borno, qui a lui aussi requis l'anonymat, a affirmé que «plus de 30 hommes ont été tués pendant cette attaque qui a duré presque quatre jours».

«Les assaillants ont ensuite tenu tout le village en otage pendant trois jours», a-t-il ajouté.

«Le village a été détruit. Certains des survivants qui n'avaient aucun moyen de se déplacer, notamment les femmes et les hommes âgés, ont marché jusqu'à Lassa, dans le district d'Asikara-Uba, à 25 kilomètres» de là, alors que d'autres ont trouvé refuge dans l'État voisin d'Adamawa, a précisé le responsable de Damboa.

Ali Ndume, le sénateur du sud de l'État de Borno, où est située Damboa, a confirmé à l'AFP qu'«Il y a eu des enlèvements dans certains villages», mais il a dit ne pas être sûr «que leur nombre soit aussi important que 60».

Des jeunes femmes, mais aussi des jeunes hommes, ont été enlevés par les islamistes «qui ont laissé les personnes âgées», dans le village de Kummabza qui est peu peuplé pendant la saison des pluies à cause des inondations et non gardé par l'armée, selon le sénateur. Des journaux nigérians évoquent aussi le rapt de 30 garçons.

Possible reprise des négociations?

Boko Haram, dont l'insurrection sanglante a fait plusieurs milliers de morts au Nigeria depuis 2009, a commencé à enlever des jeunes filles dans cette région bien avant le rapt de plus de 200 lycéennes de la ville de Chibok, également dans l'État de Borno, mi-avril, qui a provoqué une vive émotion au Nigeria et au-delà.

Un rapport de Human Rights Watch datant de fin 2013 fait notamment état d'enlèvements et de viols de femmes et de jeunes filles par le groupe islamiste et d'enrôlement de force de jeunes enfants.

Début juin, au moins vingt jeunes femmes ont été enlevées dans une communauté peule, dans le village de Garkin et ses alentours, à 8 km de Chibok.

Selon l'expert en sécurité Ryan Cummings, de la société sud-africaine Red 24, le nouvel enlèvement de 60 femmes pourrait être une tactique de Boko Haram visant à attirer à nouveau l'attention de la communauté internationale sur le sort des filles de Chibok et à remettre sur la table un possible échange de militants islamistes détenus contre les 219 lycéennes toujours captives.

«On dirait qu'il y a une perte d'intérêt, à la fois à l'international et dans le pays sur cette question, et que les efforts du gouvernement nigérian pour résoudre le problème des otages diminuent», a-t-il déclaré à l'AFP.

«On a appris le 26 mai que le gouvernement nigérian avait refusé un échange d'otages avec la secte et que, par conséquent, les négociations étaient au point mort», explique M. Cumings.

Ce nouveau kidnapping pourrait être «une tentative de la part de Boko Haram de reprendre et de conclure les négociations», a-t-il dit.