Le président nigérian Goodluck Jonathan a promis jeudi une «guerre totale» contre le groupe islamiste armé Boko Haram, contre lequel l'armée intensifie ses efforts pour libérer les plus de 200 adolescentes enlevées il y a plus d'un mois, alors qu'une nouvelle attaque imputée aux terroristes a fait 35 morts.

«Je suis déterminé à protéger notre démocratie, notre unité nationale et notre stabilité politique en faisant une guerre totale au terrorisme», a déclaré le président dans un discours commémorant les 15 ans de la fin de la dictature militaire, dans le pays le plus peuplé d'Afrique et la plus puissante économie du continent.

«L'unité et la stabilité de notre pays et la protection des vies et des biens ne sont pas négociables», a-t-il poursuivi.

Les élections du 29 mai 1999 avaient mis fin à 16 ans de dictature militaire. Mais à mesure que l'insurrection islamiste est montée en puissance depuis 2009 dans le Nord, faisant des milliers de morts (plus de 2000 depuis le début de 2014), les droits de l'homme ont reculé, à cause de la répression souvent aveugle des forces de sécurité.

Le rapt de plus de 200 écolières le 14 avril à Chibok, dans l'État de Borno, dans le nord-est du Nigeria, a provoqué un scandale mondial et donné un écho sans précédent à l'insurrection de Boko Haram.

Cet enlèvement a également conduit plusieurs pays - États-Unis, Grande-Bretagne, France, Chine et Israël - à fournir une aide militaire et de renseignement.

«J'ai donné ordre à nos forces de sécurité de lancer une opération à grande échelle pour mettre fin à l'impunité des terroristes sur notre sol», a indiqué M. Jonathan.

«J'ai aussi autorisé les forces de sécurité à utiliser tous les moyens légaux nécessaires pour s'assurer que ce but sera atteint. Je vous garantis que le Nigeria redeviendra un pays sûr et que ces voyous seront chassés», a-t-il ajouté.

M. Jonathan a réaffirmé que le groupe islamiste Boko Haram était lié à des organisations terroristes étrangères comme Al-Qaïda.

«Pour nos concitoyens qui se sont alliés à Al-Qaïda et aux groupes terroristes internationaux en croyant à tort que la violence pouvait résoudre leurs problèmes, nos portes restent ouvertes pour le dialogue et la réconciliation, s'ils renoncent au terrorisme et s'engagent pour la paix», a affirmé le président.

35 morts dans une triple attaque

Des combattants de Boko Haram ont tué 35 personnes dans trois villages du nord-est du Nigeria, dans l'État de Borno proche de la frontière camerounaise, ont indiqué jeudi une source militaire et des habitants.

Des dizaines de membres de Boko Haram vêtus d'uniformes militaires, juchés sur des véhicules tout-terrain et des motos, ont attaqué mercredi les villages de Gumushi, Amuda et Arbokko, ouvrant le feu sur les habitants et incendiant les maisons avec des cocktails Molotov, ont ajouté ces sources.

«Boko Haram a attaqué les trois villages mercredi matin. Trente-cinq personnes ont été tuées, dont 26 à Gumushi», a déclaré à l'AFP un militaire à Maiduguri, la capitale de l'État, sous couvert d'anonymat.

«Les insurgés ont lancé des cocktails Molotov sur les maisons, y mettant le feu, et ont tiré sur des habitants qui tentaient de s'enfuir», a-t-il dit.

Les hommes armés ont attaqué le village de Gumushi vers 6 h du matin (heure locale, 51 h à Montréal), où ils ont tué 26 habitants, a ajouté ce gradé.

Toutefois, des médias locaux ont affirmé que dans ce seul village le bilan s'élevait à 42 morts.

Selon des témoins, les assaillants ont aussi lancé des attaques coordonnées sur les villages voisins d'Amuda et d'Arbokko, à 125 kilomètres de Maiduguri, y tuant neuf personnes et détruisant des dizaines de maisons.

«Les assaillants sont arrivés à 2 h du matin (21 h, heure de Montréal) quand les gens dormaient et ont lancé sur les maisons des cocktails Molotov qui ont explosé et provoqué des incendies», a raconté un habitant, Pirda Takweshe.

«Puis ils ont ouvert le feu sur les gens alors qu'ils sortaient en courant de leurs maisons, tuant neuf personnes et en blessant 13 autres», a-t-il détaillé.

Le pouvoir nigérian tend de plus en plus à rejeter sur des forces extérieures les responsabilités de la violence de Boko Haram. Mais les experts disent que c'est faux, la violence plongeant ses racines dans la situation politique intérieure.

Selon eux, le Nigeria n'arrivera pas à mettre fin à l'insurrection tant que l'extrême pauvreté, l'illettrisme, le sous-développement et la corruption continueront de régner dans le Nord, où ils alimentent l'insurrection.

«C'est un triste constat que je vous adresse aujourd'hui. Toutes les avancées de ces 15 années de gouvernement démocratique sont menacées par la présence du terrorisme international», a déclaré M. Jonathan.

Il a appelé les islamistes à renoncer à la violence.

«Mon gouvernement, tout en poursuivant les opérations de sécurité, explorera toutes les options, y compris la possibilité accordée aux insurgés de renoncer inconditionnellement à la violence et d'assurer leur dé-radicalisation, leur réhabilitation et leur réintégration dans la société», a-t-il dit.