Après bien des péripéties, l'ex-président sénégalais Abdoulaye Wade était en route vendredi soir pour son pays qu'il avait quitté après sa défaite de 2012, et où revient soutenir son fils en prison et en instance de jugement.

Bloqué depuis mercredi au Maroc, Wade a finalement pu quitter Casablanca à bord d'un jet privé et était attendu à Dakar vers 21 h GMT (17 h heure du Québec), ont annoncé à l'AFP des proches voyageant avec lui.

C'est la deuxième fois cette semaine que l'arrivée d'Abdoulaye Wade est annoncée par son parti, le Parti démocratique sénégalais (PDS), après un premier retour avorté mercredi, sur fond de controverse avec le gouvernement.

Il aurait dû arriver vendredi après-midi et il était alors prévu de «l'accueillir et de former un cortège» de l'aéroport au siège du PDS à Dakar, où Wade devait s'adresser aux militants. Ce programme risque d'être bouleversé par son arrivée tardive.

Abdoulaye Wade, 87 ans, qui a dirigé le Sénégal pendant douze ans de 2000 à 2012, était parti en France après sa lourde défaite face à Macky Sall, un de ses anciens premiers ministres, le 25 mars 2012 au second tour de l'élection présidentielle.

«J'ai compris depuis longtemps que Macky Sall ne veut pas que j'arrive de jour», a affirmé jeudi l'ex-chef de l'État en dénonçant «des manoeuvres», depuis Casablanca au Maroc où il se trouve depuis mercredi.

M. Wade a accusé les autorités sénégalaises d'avoir refusé de lui donner l'autorisation de survol et d'atterrissage nécessaire à son arrivée.

À la suite de ce «blocage», le PDS, dont il est toujours le secrétaire général, avait annoncé qu'il rentrerait jeudi, puis finalement vendredi.

Ses accusations ont été démenties par le porte-parole du gouvernement sénégalais, Abdou Latif Coulibaly, qui a évoqué des modifications de dernière minute sur la liste des passagers, imposant une nouvelle requête auprès des autorités aéronautiques sénégalaises.

Il a accusé l'ex-chef de l'État d'avoir cherché à provoquer «un effet politique» en vue de se faire passer pour une victime et de «discréditer» le gouvernement.

Le jour «de tous les dangers» 

Depuis mercredi, le retour annoncé et retardé de Wade crée la polémique et a installé une atmosphère fébrile à Dakar.

«Un vendredi lourd de menaces», titrait le quotidien Le Populaire alors que le journal Walfadjri évoquait le jour «de tous les dangers».

Les forces de sécurité sont sur le pied de guerre et des policiers antiémeutes sont postés en différents lieux et grands axes de Dakar.

Le gouvernement avait interdit mercredi un rassemblement prévu à l'arrivée d'Abdoulaye Wade qui avait tenu à affirmer qu'il ne rentrait pas pour «déstabiliser» le régime, tout en demandant à ses partisans de venir au réuni rassemblement interdit.

L'ex-président est attendu alors que son fils Karim Wade, qui fut aussi ministre durant son mandat, est en détention préventive depuis un an.

Karim Wade doit être jugé en juin pour enrichissement illicite présumé, dans le cadre de la traque des biens mal acquis déclenchée par le président Sall après son élection.

La justice sénégalaise reproche à Karim Wade, 45 ans, qui a eu des pouvoirs étendus sous le régime de son père, d'avoir un patrimoine «illicite» d'abord estimé à 1,2 milliard d'euros, puis ramené à 178 millions d'euros, accusations qu'il nie en bloc.

Le PDS, auquel appartient également Karim Wade, a dénoncé une «chasse aux sorcières» qui touche aussi d'autres responsables du parti.

Dans un entretien au quotidien français Le Monde lundi, Abdoulaye Wade a accusé Macky Sall, un de ses anciens premiers ministres, d'avoir «utilisé l'idée de la traque des biens mal acquis pour combattre Karim, le faire condamner, le priver de ses droits civiques pour qu'il ne se présente pas» à la présidentielle de 2017.

Avant des élections locales prévues en juin, Abdoulaye Wade a dit aussi rentrer à Dakar pour reprendre en mains son parti affaibli et divisé depuis son départ.