Le chef d'État algérien Abdelaziz Bouteflika, donné favori de la présidentielle malgré une contestation inédite, a promis une «démocratie plus large» lors du début dimanche de la campagne électorale, assurée sur le terrain par des collaborateurs en raison de ses ennuis de santé.

«Dès 2014, il y aura un changement dans la Constitution», a déclaré son ex-premier ministre Abdelmalek Sellal devant un millier de partisans tassés dans une salle de la ville d'Adrar (Sahara).

«L'Algérie aura une démocratie large, une démocratie participative. Tous les citoyens participeront au développement du pays», a poursuivi M. Sellal, chargé pour la troisième fois consécutive de diriger la campagne de M. Bouteflika pour le scrutin du 17 avril.

Dès l'annonce le 22 février - par M. Sellal - de la candidature du président à sa réélection, les manifestations se sont multipliées contre un nouveau quinquennat de M. Bouteflika et les interrogations sur sa capacité à diriger le pays ont même provoqué une polémique au sein de la hiérarchie militaire.

Au pouvoir depuis 15 ans, le président sortant, âgé de 77 ans, apparaît considérablement amoindri depuis un AVC en avril 2013, qui a nécessité 80 jours d'hospitalisation à Paris.

Silencieux depuis des mois, il s'est finalement exprimé publiquement en déposant son dossier le 3 mars au Conseil constitutionnel. D'une voix à peine audible, il a annoncé sa candidature sous le slogan «Notre serment pour l'Algérie».

Face à une contestation repartie de plus belle après, le chef d'État sortant s'est adressé samedi aux Algériens: «Les difficultés liées à ma santé ne semblent pas me disqualifier à vos yeux ou plaider en faveur de ma décharge des lourdes responsabilités qui ont eu raison d'une bonne partie de mes capacités», a-t-il dit dans un message relayé par l'agence APS.

Fait inédit, le favori a réparti dimanche sept représentants à travers le pays, chargés de mener sa campagne dans une compétition qui s'annonce déséquilibrée face à des adversaires ne pouvant compter que sur eux-mêmes sur le terrain.

Une campagne par procuration

Outre M. Sellal, le patron du Front de Libération nationale (FLN) Amar Saâdani, le président du Sénat Abdelkader Bensalah, deux ministres, Amara Benyounès et Amar Ghoul, et l'ex-patron du FLN et ancien premier ministre, Abdelaziz Belkhadem devaient prendre la parole un peu partout dans le pays. L'ex-premier ministre Ahmed Ouyahia devait lui aussi s'exprimer dans le courant de la semaine.

Dans les rues d'Alger, les panneaux d'affichage des six candidats retenus pour ce scrutin restaient désespérément vides dimanche, à l'exception de portraits de M. Bouteflika, selon un photographe de l'AFP.

Le principal rival de M. Bouteflika sera Ali Benflis, 69 ans, son ancien homme de confiance et déjà concurrent lors de la présidentielle de 2004.

M. Benflis devait s'adresser à ses partisans à Mascara (350 km à l'ouest d'Alger), ville de l'émir Abdelkader, fondateur de l'État moderne algérien.

Dans une interview parue dimanche dans Jeune Afrique, M. Benflis a appelé à une «alternative démocratique» et a promis une nouvelle Constitution pour «rétablir l'équilibre des pouvoirs».

Samedi, le site officiel de M. Bouteflika avait été piraté pour faire apparaître un titre assurant «Ali Benflis sera le futur président» -avec la faute d'orthographe pour «future»-, selon El-Watan2014, site de la présidentielle du journal francophone. La direction de la communication du candidat a reconnu l'incident dimanche en annonçant la «fermeture momentanée» du site «suite à des attaques».

Les quatre autres candidats sont Louisa Hanoune du Parti des Travailleurs (gauche), Moussa Touati, président du Front national algérien (nationaliste), Ali Fawzi Rebaïne, chef d'un autre parti nationaliste, Ahd (Serment) 54, et Abdelaziz Belaid, un ancien du FLN qui a fondé en 2012 le Front El Moustakbel.

Cinq partis d'opposition et l'ex-chef du gouvernement, Ahmed Benbitour qui avait renoncé à se présenter quand M. Bouteflika a annoncé sa candidature, ont créé une Coordination nationale pour le boycottage du scrutin. Après avoir réuni vendredi des milliers de partisans à Alger, ils se sont rencontrés dimanche pour mettre au point un programme de transition.

L'ancien président Liamine Zeroual, qui s'est retiré de la politique mais reste très populaire, est lui-même sorti de son silence jeudi pour réclamer une «alternance du pouvoir».