Plusieurs localités de province étaient en proie à des violences samedi et des habitants appelaient au secours les forces internationales à l'avant-veille de l'élection d'un nouveau président censée stabiliser la Centrafrique après dix mois de chaos.

«Il y a des violences un peu partout, à Bouar (dans l'ouest, près de la frontière camerounaise) Sibut (au nord de Bangui), Boali (dans le nord-ouest)», a reconnu un officier de la Misca, la force africaine.

«Les gens sont dans une situation de désespoir et plus on va aller vers l'élection plus ça va aller crescendo. Notre téléassistance est saturée, on essaye de faire ce qu'on peut, mais on ne peut pas mettre un militaire dans chaque maison», a-t-il ajouté sous couvert de l'anonymat.

Quelque 4400 hommes de la Misca et 1600 soldats français de l'opération Sangaris tentent de rétablir l'ordre en Centrafrique, plongée dans la violence et la haine intercommunautaire depuis que les ex-rebelles Séléka ont pris le pouvoir en mars 2013.

Mais ils sont essentiellement déployés à Bangui où le Parlement provisoire enregistrait samedi les dernières candidatures à la désignation d'un président de transition. Le vote prévu lundi doit combler le vide laissé par la démission le 11 janvier de Michel Djotodia, accusé par la communauté internationale de passivité face aux violences.

«Je lance un cri d'alarme. Ça tire et nous sommes terrorisés», a déclaré à l'AFP un habitant de Sibut, à 160 km au nord de la capitale, contacté par téléphone: «Les Séléka règnent en seigneurs de guerre dans la ville, et il n'y a aucune force étrangère pour nous protéger». Selon lui, «la majorité des habitants se sont réfugiés en brousse».

La gare routière, le marché, ont été ravagés et les violences qui ont démarré vendredi matin, ont fait au moins trois morts, «mais il y en a certainement plus dans les quartiers», a-t-il ajouté.

Selon une source religieuse à Bangui, la paroisse de Sibut a été également été attaquée par les Séléka, les anciens rebelles qui avaient pris le pouvoir en mars dernier. «On a tenté de joindre la Misca et Sangaris pour un secours rapide, mais pour le moment il n'y a personne», a ajouté le religieux.

Contactée, la Misca a indiqué qu'une de ses unités faisait route vers Sibut.

Toujours selon la source religieuse, d'autres incidents sont en cours à Bossemptélé, près de la frontière camerounaise à l'ouest où la paroisse a été saccagée et a été pillée.

Musulmans réfugiés dans l'église

À Boali également, à 90 km au nord-ouest de Bangui, la situation restait très tendue malgré l'opération lancée vendredi par les forces Sangaris sur l'axe routier qui rejoint le Cameroun depuis la capitale, vital pour l'approvisionnement en matériel et denrées alimentaires.

«Des centaines de peuls (nomades musulmans) effrayés sont réfugiés dans mon église», a déclaré à l'AFP l'abbé Boris Wiligale, contacté par téléphone.

«Il y a au moins une dizaine de blessés, dont un bébé de sept mois atteint au visage par un coup de machette», a-t-il raconté.

Il a raconté que les forces Sangaris avaient désarmé des combattants Séléka à majorité musulmane, mais que des miliciens chrétiens anti-balaka en avaient profité pour sortir de la brousse.

«Trois musulmans dont une femme ont été tués par les anti-balaka et un chrétien qui revenait des champs a été tué par des Séleka», selon le religieux.

Un habitant a ajouté que les boutiques des musulmans avaient été saccagées.

Selon le lieutenant-colonel Thomas Mollard, responsable de la communication de Sangaris, «plus d'une centaine d'hommes sont directement impliqués sur le terrain entre Bangui et Bossembélé (à 150 km au nord-ouest), avec des forces de la Misca, pour faire cesser les exactions».

Mais dans un pays grand comme une fois et demi la France, il est quasiment impossible aux forces internationales de se déployer dans les zones reculées.

Pendant ce temps à Bangui, les parlementaires ont clôturé le dépôt des candidatures - dont la liste sera publiée dimanche- à l'élection du futur président.

Au moins une dizaine de candidats ont déposé leurs dossiers, dont la maire de Bangui Catherine Samba Panza, mais aussi Sylvain Patassé et Désiré Kolingba, respectivement fils des présidents Ange-Felix Patassé, au pouvoir de 1993 à 2003, et André Kolingba, de 1985 à 1993.