Quatre hommes sont jugés depuis mercredi au Kenya pour leur présumé «soutien à un groupe terroriste» islamiste qui avait attaqué le centre commercial Westgate de Nairobi fin septembre, le pire attentat dans le pays en 15 ans.

Le procès a débuté par le témoignage d'un garde qui se trouvait à l'extérieur du centre commercial au début de l'attaque sanglante qui, sur quatre jours, a fait 67 morts et une vingtaine de disparus, selon le bilan officiel.

Plaidant non coupable, les quatre hommes, Adan Mohamed Abidkadir Adan, Mohamed Ahmed Abdi, Liban Abdullah Omar et Hussein Hassan Mustafah, Somaliens ou d'ethnie somali, ne sont pas accusés d'avoir participé à l'assaut du commando islamiste mais de l'avoir soutenu.

L'acte d'accusation ne précise pas la nature de ce soutien mais d'après des sources sécuritaires, ils auraient joué un rôle logistique, notamment en organisant l'hébergement du commando.

Le samedi 21 septembre à la mi-journée, les islamistes - a priori quatre autres hommes - avaient pris d'assaut le Westgate en tirant sans discernement sur les commerçants et les clients de ce luxueux centre commercial de la capitale kényane, avant de s'y retrancher.

Les forces de sécurité avaient alors lancé une série d'assauts pour les déloger. Selon un membre des forces spéciales kényanes, les opérations avaient tourné à la partie de «cache-cache» avec les islamistes, aidés par la configuration des lieux: une myriade de magasins et de restaurants répartis sur quatre étages.

L'attaque a été revendiquée par les islamistes somaliens shebab affiliés à Al-Qaïda, qui ont dit agir en représailles de l'intervention militaire kényane menée contre eux dans le sud somalien depuis fin 2011. L'armée kényane a intégré depuis une force de l'Union africaine en Somalie, et contribué à chasser les shebab de nombre de leurs bastions.

Bilan probablement plus lourd

Devant le tribunal mercredi, le garde, Stephen Juma, a raconté qu'il régulait la circulation devant le centre commercial quand une voiture s'est arrêtée devant l'établissement et que trois hommes en sont sortis.

«J'ai commencé à entendre des coups de feu, j'ai appelé à l'aide par radio tout en courant vers l'entrée principale», a-t-il dit, puis «je me suis abrité dans un complexe résidentiel jusqu'à ce que les policiers arrivent». Il n'a pas vu le visage des assaillants.

Un deuxième garde, Patrick Otwane, a témoigné avoir vu deux hommes tirer à l'entrée du centre commercial, portant «des lunettes noires, des foulards, des T-shirts marrons et des vestes».

Des sources sécuritaires ayant travaillé sur l'affaire estiment que tous les membres du commando sont morts pendant le siège et les affrontements avec les forces de l'ordre.

«Nous pensons, comme les autorités kényanes, que les quatre hommes à l'intérieur du centre commercial ont été tués», avait encore affirmé le représentant du FBI à Nairobi, Dennis Brady, la semaine dernière dans une déclaration mise en ligne sur le site de l'agence américaine.

La police de New York, qui a elle aussi participé à l'enquête, n'a cependant pas exclu qu'ils aient pu fuir, aucune preuve formelle de leur décès n'ayant été découverte.

Une partie du bâtiment du Westgate s'est effondrée pendant les affrontements et les cadavres des islamistes, potentiellement enfouis sous les décombres, n'ont pas été identifiés.

Deux assaillants qui ont pu être identifiés pendant l'attaque à l'aide de vidéo-surveillance ou de coups de téléphone sont nommés dans l'acte d'accusation. Il s'agit de Mohammed Abdinur Said et de Hassan Abdi Dhuhulow, un Somalien de 23 ans qui avait séjourné en Norvège.

Le fait que le Westgate se soit partiellement écroulé rend aussi difficile d'établir un bilan précis. Compte tenu des disparus, des sources occidentales ont ainsi estimé que le nombre total de morts pourrait être en fait de 94.

L'attentat contre le Westgate est le pire perpétré au Kenya depuis celui mené par Al-Qaïda contre l'ambassade américaine en plein centre de Nairobi en 1998, qui avait tué plus de 200 personnes.

En septembre, l'incapacité des autorités kényanes à prévenir l'attaque et la conduite des opérations par les forces de sécurité au Westgate avaient fait l'objet de nombreuses critiques.

Circonstance aggravante, l'armée a été accusée de pillage généralisé des magasins du centre commercial durant le siège - ce qu'elle a nié.

Le procès se poursuit jeudi.