Les dirigeants d'Afrique centrale ont ordonné dans la nuit de jeudi à vendredi à N'Djamena aux parlementaires centrafricains, emmenés plus tôt par avion de Bangui, de préparer un accord qui s'oriente vers une mise à l'écart du président Michel Djotodia pour faciliter une sortie de crise en Centrafrique.

À l'issue de tractations marathon avec les membres du Conseil national de transition (CNT, parlement provisoire centrafricain), de proches de M. Djotodia issus de l'ex-rébellion Séléka qui a pris le pouvoir à Bangui en mars et notamment de représentants de milices anti-balaka, hostiles à M. Djotodia, les chefs d'État ou leurs représentants ont suspendu leurs travaux peu avant 4 h (3 h GMT), a constaté un correspondant de l'AFP.

Les dirigeants de la Communauté économique des États d'Afrique centrale (CEEAC) ont demandé au CNT de préparer avant 8 h un accord qui semble s'orienter vers une mise à l'écart de M. Djotodia et de son premier ministre, Nicolas Tiengaye, selon des sources proches des négociations, malgré le refus de proches de M. Djotodia.

Une nouvelle séance de travail du sommet, ouvert jeudi à la mi-journée, est convoquée vendredi à partir de 9 h pour sceller le sort du président centrafricain, à qui la communauté internationale reproche de ne pas avoir mis fin aux violences interreligieuses et aux exactions dans son pays.

Le vote du Conseil national de transition (CNT, Parlement provisoire) est indispensable à un changement de la Constitution provisoire de Centrafrique pour décider du départ de M. Djotodia et du premier ministre.

Les dirigeants de la CEEAC, réunis à l'initiative de M. Déby - puissant voisin tutélaire de la Centrafrique - ont envoyé jeudi en fin de journée un avion à Bangui pour amener dans la capitale tchadienne les 135 membres du CNT et avaient suspendu une première fois leurs travaux en attendant leur arrivée à N'Djamena.

«Personne ne peut parler d'un changement à la place des Centrafricains. La solution ne peut venir que des Centrafricains eux-mêmes (...) Il y a un régime, ses institutions et une charte, des responsables : il appartient à ses responsables de décider du sort de leur pays», avait expliqué à la presse le secrétaire général de la CEEAC, Ahmat Allami à la suspension des travaux.

«On ne sait pas de quoi il s'agit»

À Bangui, placé sous couvre-feu à 18 h (17 h GMT), les parlementaires avaient été pris au dépourvu par cette convocation. «On a eu l'information il y a juste une heure. On ne sait pas de quoi il s'agit. On a pris les contacts, on s'est regroupés pour y aller», avait expliqué à l'AFP la vice-présidente du CNT, Léa Koyassoum Doumta.

En ouvrant le sommet, M. Déby avait invité les participants à observer une minute de silence «face à cette tragédie vécue par les Africains en Centrafrique».

«Un seul constat doit être fait et il est amer : la RCA (République centrafricaine) subit au plus profond d'elle même les agissements de ses propres fils plongeant leur pays dans une guerre qui compromet dangereusement son avenir», avait ajouté M. Déby, en présence notamment de MM. Djotodia et Tiangaye, en demandant «de plus en plus des actes concrets et décisifs».

La première préoccupation des pays de la CEEAC est la paralysie totale du pouvoir de Bangui et son incapacité à rétablir l'ordre depuis des mois dans un pays livré à des violences interreligieuses.

À cet égard, «par rapport notamment à la transition politique, au fait que l'État est paralysé, il y a certainement des décisions à prendre et on va voir ce que nos amis africains décident (...)», avait déclaré de son côté jeudi matin le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius sur la chaîne de télévision France 2, pressé de dire si une démission de M. Djotodia faciliterait les choses.

La présidence centrafricaine avait démenti jeudi toute velléité de démission de M. Djotodia.

À Bangui, les tueries à grande échelle de ces dernières semaines ont progressivement cessé et la ville a retrouvé une activité quasi normale pendant la journée. «La situation s'améliore, lentement, mais elle s'améliore», a estimé jeudi le chef de l'opération française Sangaris, le général Francisco Soriano.