Hery Rajaonarimampianina, soutenu par le régime sortant, a remporté l'élection présidentielle à Madagascar selon le décompte définitif rendu public vendredi, mais la confirmation de sa victoire dépend de la décision d'une Cour chargée d'examiner les recours en annulation déposés par son adversaire.

Le vainqueur potentiel a appelé à la retenue dans l'attente de la décision de justice, qui doit intervenir sous quinze jours: «Je lance  un appel au calme à l'endroit de la population malgache en attendant le résultat définitif», a-t-il dit vendredi matin peu après l'annonce de sa victoire.

Âgé de 55 ans, cet ancien ministre des Finances du régime dit «de Transition» a obtenu 53,50% des voix, contre 46,50% à Robinson Jean Louis, le candidat adoubé par l'ancien chef de l'État Marc Ravalomanana.

M. Jean Louis, qui crie à la fraude depuis le scrutin du 20 décembre, a boycotté la cérémonie de proclamation des résultats au siège de la Commission électorale (Cenit). «Je n'ai pas écouté la proclamation des résultats par la Cenit, donc je ne sais pas ce qu'elle a dit, j'attends juste la décision de la cour électorale spéciale» a-t-il déclaré à l'AFP par téléphone.

Soutenu par l'ex-président Ravalomanana renversé en 2009, le Dr Jean Louis a déposé plus d'une centaine de recours pour dénoncer des «fraudes, défaillances et irrégularités», demandant l'invalidation du scrutin.

M. Rajaonarimampianina était le candidat d'Andry Rajoelina, l'homme qui avait renversé Ravalomanana. Il s'est dit serein dans l'attente du verdict, et a accusé son adversaire d'être le seul à parler de fraudes.

«C'est lui qui dit cela et non pas le peuple malgache, nous vivons maintenant dans le calme, il y a des résultats publiés par des institutions compétentes, plusieurs pays ont observé cette élection, ils ont tous dit le contraire, la sagesse maintenant est d'attendre le résultat officiel», a-t-il lancé.

«Il faut rester calme»

Ces fraudes présumées n'ont en effet pas été constatées par les différentes missions d'observateurs étrangers, dont celle de l'Union européenne, déployées à Madagascar pour le scrutin.

Et quand bien même la Cour électorale spéciale ne serait pas convaincue par les recours de M. Jean Louis, celui-ci espère que la présence d'Andry Rajoelina --qui devait rester neutre-- aux réunions de Hery Rajaonarimampianina sera déclarée illégale.

Vendredi, la SADC, la Communauté de développement d'Afrique australe qui a joué les intermédiaires entre les différentes mouvances malgaches pour permettre la tenue de cette élection, a également appelé au calme.

«C'est la Cour (électorale spéciale) qui va rendre le dernier jugement, je pense qu'il faut rester calme», a déclaré le médiateur de cette institution pour la crise malgache, Joaquim Chissano: «Nous faisons appel à tous les Malgaches pour rester calmes pour aider les institutions à rendre de bons jugements.»

La Cenit, pour sa part, a défendu la validité de ses résultats: «Les résultats que nous allons transmettre à la Cour électorale spéciale reflètent totalement le choix des électeurs, il n'y a pas eu de voix en plus ni en moins» a déclaré sa présidente Béatrice Atallah.

Cette élection est censée sortir Madagascar de la crise politique déclenchée en 2009 par le renversement de Marc Ravalomanana par Andry Rajoelina. Depuis près de cinq ans, ce dernier était le président d'un régime non élu. Durant cette période, Madagascar s'est retrouvée au ban des nations, les investisseurs ont déserté et l'aide internationale s'est tarie, provoquant une grave crise économique et un appauvrissement général de la population.

Ni M. Ravalomanana, ni M. Rajoelina n'ont pu se présenter à la présidentielle, sous la pression de la communauté internationale qui craignait des troubles. Ils ont chacun choisi de soutenir l'un des deux candidats qualifiés pour le deuxième tour.

Discret ministre des Finances et du Budget durant la quasi-totalité du gouvernement de Transition, M. Rajaonarimampianina a le mérite d'avoir réussi à gérer tant bien que mal les finances publiques d'un pays privé d'aide internationale. Même si son implication dans le régime qui a dirigé l'île pendant plus de quatre ans lui vaut d'être soupçonné par ses adversaires d'avoir couvert certains trafics illégaux.