La mort jeudi de Nelson Mandela, premier président noir d'Afrique du Sud et icône de la lutte contre l'injustice, a suscité une vague immédiate d'émotion à travers le monde et un afflux d'hommages sans précédent, à la hauteur de cette personnalité hors du commun.

Aucun chef d'État, résistant politique, prix Nobel ou prisonnier de conscience n'avait encore provoqué, à sa mort, un tel déferlement de marques d'émotion et de respect provenant des quatre coins de la planète.

Les leaders politiques, qui se presseront bientôt aux funérailles de l'ancien président décédé à 95 ans, ont rendu un hommage unanime à «Madiba» (le nom de clan de Mandela), insistant sur les qualités humaines de celui qui, après 27 ans passées dans les geôles de l'apartheid, en était ressorti sans rancune.

«Nous avons perdu l'un des hommes les plus influents, les plus courageux, et l'un des êtres humains les plus profondément bons (...) sur cette Terre», a déclaré un autre premier président noir, Barack Obama, qui a fait mettre les drapeaux en berne aux États-Unis.

«Grâce à sa farouche dignité et à sa volonté inébranlable de sacrifier sa propre liberté pour la liberté des autres, il a transformé l'Afrique du Sud et nous a tous émus», a-t-il souligné depuis la Maison-Blanche.

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, qui a salué une «source d'inspiration» pour le monde, a également insisté sur la dignité et l'«humilité» de Nelson Mandela.

«Nous devons nous inspirer de sa sagesse, de sa détermination et de son engagement pour nous efforcer de rendre le monde meilleur», a-t-il déclaré.

Les membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont exprimé «leur profonde admiration pour les qualités morales et politiques exceptionnelles» de Nelson Mandela, qui «restera à tout jamais dans les mémoires comme une personne qui a sacrifié une grande partie de sa vie (...) pour que des millions d'autres puissent avoir un avenir meilleur».

Autre hommage, celui du premier ministre britannique David Cameron, qui, en 2006, avait demandé pardon pour les «erreurs» de son parti à l'époque de l'apartheid. «Une grande lumière s'est éteinte», a-t-il déclaré, saluant «une légende dans la vie, et maintenant dans la mort», une «incarnation de la grâce».

En Asie, Pékin a salué en Nelson Mandela un «ami fidèle du peuple chinois», qui a su «gagner le respect et l'affection de personnes dans le monde entier».

«Un combattant magnifique»

Au-delà de son humanité exceptionnelle, Nelson Mandela restera aussi dans les mémoires comme un résistant, opposant historique et inlassable de l'apartheid.

Le président français François Hollande a ainsi vu en lui «un résistant exceptionnel», «un combattant magnifique» : il a été «l'incarnation de la Nation sud-africaine, le ciment de son unité et la fierté de toute l'Afrique».

La chancelière allemande Angela Merkel a, elle, estimé que le nom de Mandela restera «pour toujours lié au combat contre l'oppression».

Des hommages ont également afflué d'autres pays d'Afrique, et de nations ayant connu la domination coloniale.

Le président du Nigeria, Goodluck Jonathan, a ainsi salué l'un des «plus grands libérateurs» de l'histoire et «une icône de la vraie démocratie».

Au Brésil, la présidente Dilma Rousseff a rappelé que «l'exemple de ce grand dirigeant guidera tous ceux qui luttent pour la justice sociale et la paix dans le monde», tandis que le président vénézuélien Nicolas Maduro a décrété trois jours de deuil national.

« Mandela était un chef et un combattant pour la liberté de son peuple et un symbole de la libération du colonialisme et de l'occupation pour tous les peuples aspirant à la liberté», a déclaré de son côté le président palestinien Mahmoud Abbas.

En Irlande, le premier ministre Enda Kenny a remercié Mandela pour «son cadeau». «Le nom de Mandela a fait bouger notre conscience et nos coeurs. Il était devenu synonyme de la recherche de la dignité et de la liberté sur la planète», a-t-il dit.

«Vous allez nous manquer»

Parmi les personnalités, politiques ou autres, qui ont exprimé leur chagrin et leur respect, certaines avaient eu l'occasion de rencontrer personnellement le leader sud-africain.

«C'était un homme qu'il était merveilleux de côtoyer, avec un esprit vif, une jugeote politique extraordinaire et une manière adorable de charmer tout le monde», s'est remémoré l'ancien Premier ministre britannique Tony Blair, soulignant qu'«avec sa dignité, sa grâce et la qualité de son pardon, il a rendu partout le racisme non seulement immoral, mais stupide».

La légende du soccer brésilien Pelé a lui pleuré sur Twitter la mort de celui qui «était mon héros, mon ami, mon compagnon dans la lutte en faveur de la cause du peuple et pour la paix dans le monde». «Poursuivons son oeuvre», a-t-il ajouté.

Pour avoir épargné à son peuple une guerre civile raciale qui, au début des années 1990, paraissait difficilement évitable, Nelson Mandela avait obtenu en 1993 le prix Nobel de la paix, partagé avec le dernier président de l'apartheid, Frederik De Klerk.

Un autre lauréat de ce prix, Lech Walesa, chef historique du syndicat polonais Solidarité, a rendu hommage à «un grand symbole de la lutte contre l'apartheid et le racisme, en faveur de l'égalité».

Mais au milieu de ce concert d'hommages unanimes, c'est sur la terre de Madiba, en Afrique du Sud, que l'émotion était la plus forte.

«Au cours de 24 années (depuis sa libération), Madiba nous a appris comment vivre ensemble et croire en nous-mêmes et en chacun», a salué un autre héros de la lutte antiapartheid et prix Nobel de la paix, l'archevêque anglican Desmond Tutu.

Frederik De Klerk, qui l'avait fait sortir de prison en 1990, a estimé que «le courage, le charme et l'engagement de Nelson Mandela envers la réconciliation et la Constitution, ont été une source d'inspiration non seulement pour les Sud-Africains, mais pour le monde entier.»

«Je crois que son exemple lui survivra», a-t-il ajouté.

«Tata (Père), vous allez nous manquer. Mais sachez que votre esprit et votre exemple seront toujours là pour nous guider vers la vision d'une Afrique du Sud meilleure et plus juste».