L'armée française, qui doit intervenir militairement pour rétablir l'ordre en Centrafrique, a commencé jeudi à acheminer hommes et matériel vers Bangui à partir des pays voisins, en attendant une prochaine résolution de l'ONU.

«Quelques rotations d'avions militaires français ont eu lieu ces dernières heures de manière rapprochée venant surtout du Gabon, pour acheminer des matériels», a affirmé à l'AFP une source aéroportuaire sous couvert d'anonymat.

Par ailleurs, «de nombreux véhicules de patrouilles et de transport de troupes», notamment «des véhicules de l'avant blindé (VAB) et des véhicules blindés légers (VBL), sont arrivés du Cameroun par la route et ont été conduits directement au Camp militaire M'poko», la base de la force africaine en Centrafrique, a déclaré jeudi une source militaire centrafricaine.

D'après cette source, «des missions de reconnaissance du terrain et des patrouilles mixtes sont effectuées en ce moment par des équipes constituées de légionnaires et des éléments faisant partie des 410 hommes déjà positionnés à Bangui».

Le ministre français de la Défense Jean-Yves Le Drian a annoncé mardi le déploiement prochain d'un millier de soldats pour rétablir l'ordre en Centrafrique, «pour une période brève, de l'ordre de six mois à peu près».

L'opération en Centrafrique «n'a rien à voir avec le Mali», a-t-il dit. «Là, c'est l'effondrement d'un État et une tendance à l'affrontement confessionnel».

Le ministère français de la Défense n'avait pas encore confirmé jeudi matin l'envoi d'éléments logistiques.

L'opération française mobilisera au total environ un millier d'hommes, ce chiffre comprenant les 400 militaires déjà déployés sur place, selon le cabinet de M. Le Drian. Le volume des troupes est encore susceptible d'être modifié sur les instructions du président François Hollande, a-t-on précisé de même source.

La Centrafrique s'est enfoncée dans l'anarchie depuis le renversement, le 24 mars, du président François Bozizé par Michel Djotodia, chef de la coalition rebelle Séléka. M. Djotodia, devenu président de transition, a dissout la Séléka, sans pour autant réussir à rétablir l'ordre.

Dans les rues de la capitale, les véhicules des forces françaises se font désormais plus nombreux et plus visibles. La présence de militaires français alimente les discussions et les espoirs sont grands de voir enfin les exactions cesser.

«Je suis convaincu que la France ne va pas cautionner toutes ces exactions. Elle va mettre fin à tout cela et faire repartir la transition sur de nouvelles bases et un nouvel élan», a confié jeudi à l'AFP un ancien diplomate centrafricain sous couvert d'anonymat.

«Arrêter la catastrophe»

À Bangui, comme dans l'arrière-pays, les crimes à répétition commis par d'ex-rebelles devenus des bandits impitoyables menacent de faire basculer le pays dans une logique de guerre civile.

L'organisation Human Rights Watch (HRW) a dénoncé mardi soir à Paris la «stratégie criminelle» des groupes armés en Centrafrique, à l'origine de razzias et de meurtres, sans parler pour autant d'un risque de génocide, «un terme pas adapté» à la situation, selon l'ONG.

Le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a lui précisé devant la presse qu'il «s'agit d'arrêter la catastrophe en République centrafricaine et de reconstruire un pays qui n'existe plus», évoquant «une situation de non-État, d'implosion, qui risque d'avoir des conséquences sur les pays voisins».

Paris a soumis lundi au Conseil de sécurité de l'ONU un projet de résolution visant à renforcer la Mission internationale de soutien à la Centrafrique (MISCA) déjà présente, avec la perspective de la transformer en force de maintien de la paix de l'ONU.

Le texte proposé par Paris pourrait être adopté la semaine prochaine, a estimé l'ambassadeur français à l'ONU Gérard Araud.

La résolution prévoit la mise en place d'un fonds de soutien à la MISCA, qui compte 2500 hommes, sur un total prévu de 3600, mais peine à atteindre son effectif plein et manque de moyens.

Tout en réclamant «l'application rapide des accords de transition» en Centrafrique, avec dans la foulée des élections libres et équitables, le projet de texte «autorise les forces françaises» présentes dans le pays à «prendre toutes les mesures nécessaires pour soutenir la MISCA».