L'UNICEF et la Mission de l'ONU en République démocratique du Congo se sont déclarés mercredi «alarmés» par des allégations d'exécutions extrajudiciaires de jeunes et d'enfants à Kinshasa, où la police mène une vaste opération «coup de poing» contre les délinquants.

Cette inquiétude est née après qu'ils ont «reçu, au cours de ces derniers jours, des rapports préoccupants faisant état de la disparition et de l'assassinat de jeunes hommes et d'enfants dans certaines communes de Kinshasa», a déclaré à la presse Carlos Araujo, porte-parole intérimaire de la Mission de l'ONU (MONUSCO).

«Selon les informations reçues qui sont en cours de vérification, au moins une vingtaine de personnes, dont 12 enfants, auraient été tuées. L'UNICEF et la MONUSCO demandent que des mesures immédiates soient prises par les autorités congolaises, afin de mettre fin à ces actes», a-t-il ajouté.

«Des policiers et autres agents de sécurité non autrement identifiés ont été mobilisés en vue de traquer, arrêter, torturer et parfois exécuter en public» les bandits présumés, écrit dans un communiqué le Réseau national des ONG des droits de l'homme de la RDC (RENADHOC), qui estime à «plusieurs dizaines» le nombre de victimes.

«Le gouvernement est appelé à éradiquer la criminalité urbaine (...) en utilisant les moyens et méthodes qui respectent les droits de l'homme», et les délinquants «doivent être arrêtés, traduits en justice et condamnés à des peines proportionnelles à leurs actes de gangstérisme répréhensibles», a plaidé le RENADHOC.

L'UNICEF et la MONUSCO appellent également à ce que des enquêtes soient menées et que les responsables de ces exactions soient jugés.

Même requête chez le RENADHOC, qui demande en plus la création d'une «commission indépendante d'enquête sur les cas avérés d'exécutions sommaires» et la mise en place de «programmes cohérents» de réinsertion sociale.

Les rapports d'exécutions et de disparitions coïncident «avec le début de l'opération Likofi (Coup de poing, en lingala), lancée le 15 novembre 2013 pour une durée de trois mois par les autorités congolaises, afin de juguler la délinquance urbaine», a souligné le porte-parole de l'ONU.

La police de Kinshasa a lancé cette opération pour combattre le banditisme de jeunes désoeuvrés appelés «kuluna», qui depuis des années volent, agressent et tuent des habitants de la capitale congolaise.

Des habitants affirment que la police s'est livrée à plusieurs exécutions de kuluna présumés. Le colonel Mwana Mputu, chef de la cellule média de l'opération, a formellement démenti mardi à l'AFP ces allégations, et souligné que s'il y avait «dérapage» il y aurait des «sanctions».

Arrivée de l'envoyée spéciale de l'ONU pour les Grands Lacs

L'envoyée spéciale de l'ONU dans les Grands-Lacs, Mary Robinson, est arrivée mercredi à Kinshasa dans le cadre d'une tournée d'une semaine dans la région pour tenter de soutenir les efforts de paix dans l'Est de la RDCongo, a-t-on appris après de Mission de l'ONU.

«Elle est arrivée à 13h00 par Brazzaville (au Congo voisin)» pour une visite de trois jours qui la mènera à Kinshasa et Goma, la capitale de la province riche et instable du Nord-Kivu (Est), a déclaré mercredi à l'AFP Carlos Araujo, porte-parole intérimaire de la Mission de l'ONU pour la stabilisation de la République démocratique du Congo (Monusco).

«Demain (jeudi) matin elle doit rencontrer le ministre des Affaires étrangères (Raymond Tshibanda), puis le premier ministre (Augustin Matata Ponyo). Dans l'après-midi, elle doit s'entretenir avec le président du Sénat (Léon Kengo wa Dondo) et de l'Assemblée nationale (Aubin Minaku), l'opposition parlementaire (...)», a-t-il ajouté.

«Ses entretiens en RDC porteront sur le dialogue de Kampala» entre les délégations du gouvernement congolais et du Mouvement du 23 mars (M23), dont le bras armé a capitulé le 5 novembre, après un an et demi de rébellion au Nord-Kivu, avait expliqué à la presse plus tôt dans la journée M. Araujo.

Le M23 était un groupe armé essentiellement Tutsi congolais. Des experts de l'ONU ont accusé le Rwanda et l'Ouganda de le soutenir, malgré leurs démentis. La RDC et le M23 devaient signer le 11 novembre un texte mettant fin au conflit, mais Kinshasa a refusé, exigeant, forte de sa victoire militaire, une modification de certains termes.

Les entretiens de Mme Robinson porteront aussi sur «les progrès dans la mise en oeuvre des recommandations issues des concertations nationales récemment conclues, et l'appui au Mécanisme national de suivi établi dans le cadre de l'accord-cadre» d'Addis-Abeba sur la paix, la sécurité et la coopération pour la RDC et la région.