Les Maliens votaient dimanche au premier tour d'élections législatives placées sous haute surveillance armée, par crainte d'attentats de jihadistes toujours actifs malgré l'intervention militaire étrangère entamée il y a près d'un an pour les traquer.

Un journaliste de l'AFP a constaté une faible affluence à l'ouverture des bureaux à Bamako.

«Il n'y a pas de monde, les candidats n'ont pas mobilisé, mais j'espère que dans l'après-midi, il y aura plus de monde», a déclaré Oumou Sawadogo, électrice d'un centre installé dans un lycée de la capitale.

Un peu plus loin, Boubacar Tembely est amer, même s'il tient à accomplir son devoir électoral: «Les politiciens sont tous les mêmes, j'ai voté blanc pour les sanctionner».

À 15 kilomètres de là, à Kati, commune qui abrite l'ancien quartier général d'Amadou Sanogo - l'auteur du coup d'État qui, en mars 2012, a plongé le Mali dans le chaos -, l'affluence n'est pas plus forte.

Une élégante étudiante qui ne donne que son prénom, Nafissatou, affirme: «Pour la présidentielle, j'ai voté IBK (Ibrahim Boubacar Keïta, élu en août), mais aujourd'hui, j'ai voté pour ses adversaires. IBK n'a pas pu régler l'affaire du Nord, je suis déçue».

Quelque 6,5 millions d'électeurs sont appelés à voter pour ces législatives censées parachever le retour à l'ordre constitutionnel, interrompu par le coup d'État de mars 2012 qui avait précipité la chute du nord du Mali aux mains de groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda.

Plus de 10 mois après une intervention armée internationale initiée par la France en janvier 2013, ces groupes continuent à mener attaques et attentats dans cette région qui, depuis fin septembre, ont tué une dizaine de soldats maliens et tchadiens et des civils.

Vendredi à Bamako, un gendarme français a été légèrement blessé par un tireur embusqué aux motivations encore floues, première action de ce type dans la capitale malienne depuis le début de l'intervention française.

La veille, des roquettes, sans doute tirées par des groupes islamistes, étaient tombées dans la périphérie de Gao, la plus grande ville du Nord, sans faire de victimes.

Et le 2 novembre, deux journalistes français de Radio France Internationale (RFI), Ghislaine Dupont et Claude Verlon, avaient été enlevés à Kidal (1500 km au nord-est de Bamako) et tués peu après, une action revendiquée par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).

Soldats maliens et étrangers surveillent

L'incertitude demeure quant au bon déroulement du scrutin à Kidal (nord), berceau des Touareg et de leur rébellion du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), où règne l'anarchie malgré la présence des forces françaises, maliennes et africaines de la mission de l'ONU au Mali, la Minusma.

Ce sont ces forces armées qui surveilleront le scrutin, tant à Bamako que dans le Nord.

De manière générale, la campagne électorale a été terne et a peu mobilisé, ce qui pourrait entraîner une baisse du taux de participation par rapport à la présidentielle de juillet/août. Il avait alors tourné autour de 50%.

Elle avait été largement remportée au second tour, le 11 août, par Ibrahim Boubacar Keïta face à Soumaïla Cissé, qui avait reconnu sa défaite avant même la publication des résultats officiels.

L'objectif du parti présidentiel, le Rassemblement pour le Mali (RPM), est de donner au chef de l'État une majorité confortable parmi les 147 députés de l'Assemblée nationale pour lui permettre de mener à bien sa difficile mission de redressement du pays, mais il sera sans doute obligé de nouer des alliances.

Soumaila Cissé, originaire de la région de Tombouctou (nord-ouest) où il est le candidat de son parti, l'Union pour la République et la démocratie (URD), ambitionne de devenir le chef de l'opposition parlementaire.

Il avait été l'un des plus farouches opposants au coup d'État de Sanogo, que la justice malienne a convoqué fin octobre pour répondre des nombreuses exactions dont ont été accusés ses hommes après le putsch.

Sanogo, capitaine bombardé général en août par le régime de transition alors en place, n'a toujours pas répondu à cette convocation, ce dont s'est indignée une coalition de partis, dont celui de M. Cissé.

Des hommes armés enlèvent une urne

Des hommes armés ont dérobé dimanche une urne dans un bureau de vote d'une localité de la région de Goundam, près de Tombouctou (nord-ouest du Mali), a indiqué le maire de Goundam.

«Dans la localité de Bajakary, à 80 kilomètres de Goundam, des hommes armés ont enlevé une urne» d'un bureau, a déclaré la maire, Oumou Sall Seck. «J'ai envoyé des huissiers sur place pour constater les faits», a-t-elle ajouté, en signalant également qu'à «Takoubao, autre localité située à 15 kilomètres de Goundam, les cartes d'électeurs ont été confisquées».

Mme Sall Seck n'a fourni aucune indication sur l'identité de ces hommes armés.

Dadié Diango, président local de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) de la région de Goundam, a par ailleurs noté «plusieurs anomalies» dans cette région du sud-ouest de Tombouctou, en particulier l'absence de plusieurs urnes dans des bureaux, dont certaines ont été enlevées «par un élu», qu'il n'a pas nommé.