Le journaliste marocain Ali Anouzla, dont l'incarcération sur des accusations d'«aide au terrorisme» a suscité de vives protestations au Maroc et à l'étranger, a été remis en liberté provisoire vendredi, a indiqué un photographe de l'AFP.

Après plus d'un mois passé dans la prison de Salé, près de Rabat, ce journaliste de renom, directeur de la version arabophone du site Lakome, a quitté les lieux à la mi-journée en compagnie de son avocat Me Hassan Semlali, selon la même source.

Des membres de son comité de soutien étaient présents pour l'accueillir.

«Nous avons gagné parce qu'Ali est parmi ses proches et amis, mais on n'est pas encore sorti de l'auberge», a commenté un membre de ce comité, Fouad Abdelmoumni. «Il est toujours poursuivi en état de liberté et le problème de la liberté d'expression reste posé», a-t-il avancé.

Un peu plus tôt, Me Semlali, qui avait déposé mardi une demande libération provisoire auprès du juge d'instruction de la cour d'appel de Salé, avait annoncé que la libération de M. Anouzla avait été décidée.

M. Anouzla reste inculpé pour «aide matérielle», «apologie» et «incitation au terrorisme». Une nouvelle audience est prévue mercredi prochain.

Aux termes de la loi antiterroriste votée en 2003 après une vague d'attentats à Casablanca, il risque jusqu'à 20 ans de prison, selon Amnesty International.

Ali Anouzla, connu pour ses prises de position critiques envers les autorités, a été arrêté le 17 septembre à la suite de la diffusion d'un article sur une vidéo d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).

La version arabophone de Lakome avait, à cette occasion, publié un lien vers le site du quotidien espagnol El Pais, où la vidéo en question, d'une quarantaine de minutes, était disponible.

Après plusieurs jours de garde à vue dans les locaux de la police judiciaire, Ali Anouzla avait été incarcéré à la prison de Salé, où sont détenues les personnes impliquées dans des affaires de terrorisme.

Cette affaire a entraîné plusieurs manifestations au Maroc pour demander sa libération, ainsi qu'un flot de protestations d'ONG internationales.

Les détracteurs de M. Anouzla lui reprochent d'avoir offert une tribune à Aqmi. Ses soutiens font valoir que Lakome avait prévenu qu'il s'agissait d'une vidéo de «propagande».

Les versions arabophone et francophone de ce site indépendant ont récemment été bloquées au Maroc.

Les autorités ont affirmé que cette décision judiciaire avait été prise conformément à une volonté exprimée par Ali Anouzla dans un communiqué. Mais d'autres responsables de Lakome ont dénoncé une «censure».

Dans un communiqué, RSF a exprimé vendredi son «soulagement» après la libération de M. Anouzla, mais demandé «l'abandon des charges qui pèsent toujours contre» lui.

Human Rights Watch (HRW) et Amnesty International avaient également condamné l'inculpation d'Ali Anouzla, «un prisonnier de conscience, détenu uniquement pour avoir exercé sa profession de journaliste», selon cette dernière ONG basée à Londres.