Jusqu'alors épargné par la déferlante du Printemps arabe, le gouvernement soudanais fait face, depuis le début de la semaine, à des soulèvements populaires d'une ampleur inégalée. Le président Omar el-Béchir sera-t-il le prochain à figurer sur la liste des déchus?

C'est la levée des subventions sur les carburants, et la hausse des prix qu'elle a entraînée, qui a mis le feu aux poudres. Plusieurs milliers de Soudanais ont, depuis cinq jours, pris d'assaut les rues de Khartoum et d'autres villes du pays pour manifester leur colère.

À plusieurs reprises, les forces de l'ordre ont réprimé les soulèvements à grand renfort de grenades lacrymogènes. Hier soir, au cinquième jour de manifestations, on dénombrait une trentaine de morts, selon des sources officielles; une cinquantaine, selon plusieurs ONG. Six cents personnes ont aussi été arrêtées et devraient être jugées la semaine prochaine.

Le prix des carburants n'est pas la seule cible des manifestants, qui revendiquent également le départ d'Omar El-Béchir. Depuis l'accession de ce dernier au pouvoir, en 1989, jamais il n'a fait face à une telle opposition populaire.

Selon des données de la Banque mondiale, 46,5% des Soudanais vivaient sous le seuil de pauvreté en 2009.

Un pays déchiré

Le régime est aux prises, depuis le début des années 2000, avec divers déchirements politiques.

La récente sécession du Soudan du Sud, confirmée par référendum en janvier 2011 après plus de 20 ans de conflit, a profondément changé la donne économique du pays. Avec son indépendance, le Soudan du Sud a conservé sur son territoire près de 80% des réserves de pétrole du pays, estimées à 9000 milliards de barils. Même si les redevances sont partagées avec le Nord, l'économie pétrolière, qui représente 90% des exportations, force le régime de Khartoum à chercher de nouvelles avenues économiques.

Autre conflit majeur qui a déstabilisé le pays, la répression de rébellions au Darfour, conflit qui a causé une catastrophe humaine et a valu à Omar El-Béchir un mandat d'arrêt lancé par la Cour pénale internationale.

Le Soudan sous le règne d'Omar El-Béchir

1989 À la suite d'un coup d'État, Omar El-Béchir s'empare du pouvoir.

1991 Une loi pénale sévère est instaurée.

2003 Des mouvements de rébellion naissent au Darfour. Ils seront durement réprimés.

2005 Un accord de paix est signé avec le Soudan du Sud.

2007 Un mandat d'arrêt international est lancé par la Cour pénale internationale à l'encontre d'El-Béchir.

2011 Après référendum, le Soudan du Sud devient officiellement indépendant.

2013 D'importants soulèvements populaires sont réprimés par le pouvoir.