Le Parlement ougandais a adopté mardi une loi controversée limitant les manifestations publiques, et qui, selon des organisations de défense des droits de l'Homme, risque «de porter un coup sévère au débat politique».

Le texte adopté octroie notamment de nouveaux pouvoirs à la police, qui pourra bloquer un rassemblement public programmé pour débattre de politique dès qu'au moins trois personnes y participeront.

Chaque rassemblement devra être soumis à autorisation de la police, par écrit, une semaine à l'avance.

«C'est la meilleure loi (...) elle protège les intérêts de la population», s'est félicité Moses Ali, un député du parti au pouvoir.

«Nous avons tenté, autant que possible, de concilier les opinions exprimées par l'opposition et ce que pense le public.»

Un membre de l'opposition parlementaire, Moses Kasibante, a cependant déjà averti que la nouvelle législation serait combattue devant la Cour constitutionnelle.

«C'est une mauvaise loi qui restreint la liberté de parole et d'expression et nuit aux valeurs démocratiques,» a-t-il estimé.

Amnistie internationale a elle aussi dénoncé une loi qui impose «de vastes restrictions aux rassemblements publics».

«Le gouvernement ougandais doit arrêter d'essayer d'écraser les droits à la liberté de parole et aux manifestations pacifistes ancrées dans la propre Constitution (du pays) et les lois internationales», a lancé Sarah Jackson, responsable adjointe de l'Afrique à l'organisation de défense des droits de l'Homme.

«Cette loi insidieuse est destinée à intimider la société civile et réduire encore un peu plus l'espace politique ougandais», a-t-elle ajouté.

Pour Human Rights Watch, la loi est «un coup dévastateur porté à la liberté d'expression et de rassemblement».

«Les élections de 2016 sont demain et l'espace pour la contestation politique rétrécit vite», a estimé Maria Burnett, de l'organisation basée à New York.

La police ougandaise tente déjà régulièrement de bloquer des manifestations d'opposants politiques, qui ont notamment multiplié les actions l'an dernier contre le coût élevé de la vie au pays.

Une figure de l'opposition, Kizza Besigye, est aussi régulièrement arrêtée ou empêchée de quitter son domicile, même s'il n'est plus officiellement le chef du Forum pour le changement démocratique.

En mai, la police a encore fermé pendant 10 jours deux quotidiens indépendants majeurs et deux radios qui avaient fait état de dissensions au sein de l'armée sur la succession du président Yoweri Museveni.