Le président du Soudan du Sud, Salva Kiir, a suspendu mardi tout son gouvernement jusqu'au vice-président pour procéder au plus important remaniement de l'exécutif du pays depuis sa création il y a deux ans, a déclaré le ministre sortant de l'Information.

«Le président Kiir veut procéder à un grand remaniement, de sorte que, du vice-président aux ministres et vice-ministres, tous ont été relevés de leur fonction», a dit à l'AFP le ministre de l'Information et porte-parole de l'équipe sortante, Barnaba Marial Benjamin.

Parmi les responsables suspendus figurent le vice-président Riek Machar ainsi que Pagan Amum, secrétaire général du parti au pouvoir, le Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM).

Beaucoup de ministres ont été des figures clés du SPLM ou de son aile armée lors de la guerre civile de 1983-2005 contre le gouvernement de Khartoum qui a débouché en 2011 sur un referendum d'auto-détermination et à l'indépendance du Soudan du Sud.

Un journaliste de l'AFP à Juba a vu de nombreux membres des forces de sécurité déployés dans les rues, ce qui n'est pas rare dans la capitale, où le calme semblait régner.

Certains habitants ont cependant fait part de leur inquiétude.

«Les gens restent chez eux. Si des gens sont en ville, ils regagnent rapidement leur domicile pour éviter tout trouble éventuel», a déclaré un étudiant interrogé, Richard Jok.

M. Benjamin, qui s'exprimait en qualité de député et non plus de ministre, a défendu la décision du président Kiir qui continue d'assurer la direction de l'exécutif.

Il a souligné que la suspension du gouvernement n'entrainait aucune «instabilité».

«Il est conforme à la Constitution qu'il (le président) forme et dissolve le gouvernement», a-t-il expliqué.

La composition du nouveau cabinet n'a pas été annoncée et on ignorait combien d'ex-ministres seraient reconduits et quand serait formé la nouvelle équipe.

«Certains vont revenir, d'autres non», a dit M. Benjamin.

Des rumeurs ont circulé à Juba ces dernières semaines sur la possibilité d'un remaniement, notamment en raison de relations difficiles du président Kiir avec son vice-président Machar.

La décision de mardi a cependant surpris y compris au sein du gouvernement sortant.

«On m'a informé que cela avait été annoncé à la télévision nationale», a dit M. Amum, du SPLM, sans préciser les raisons de sa suspension et de celle de l'équipe gouvernementale.

Le mois dernier, le président Kiir avait suspendu deux de ses principaux ministres soupçonnés d'être impliqués dans un vaste scandale de corruption.

L'immunité du ministre des Finances Kosti Manibe et du ministre du cabinet de la présidence Deng Alor avait été levée pour qu'ils puissent être interrogés par une commission d'enquête spéciale sur un «présumé transfert irrégulier» de près de huit millions de dollars.

Le président Kiir avait aussi demandé en avril que les pouvoirs du vice-président Machar, une figure controversée qui avait fait défection du SPLM pendant la guerre et s'était rallié à Khartoum, soient réduits. Des dizaines de généraux ont également été démis au cours de l'année écoulée.

En juin 2012, le président sud-soudanais avait dénoncé les «responsables corrompus» de son pays, liés au pouvoir et soupçonnés d'avoir détourné près de quatre milliards de dollars, selon lui.

Miné par la corruption, le Soudan du Sud est l'un des pays les plus pauvres du monde malgré des ressources pétrolières.

Des tensions pouvant aller jusqu'à des heurts frontaliers continuent de l'opposer au Soudan et il est le théatre de meurtriers conflits ethniques internes.