La brigade d'intervention de l'ONU censée combattre les groupes armés dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC) sera prête d'ici «un à deux mois», a annoncé jeudi à Goma, ville stratégique de l'est congolais, le secrétaire général de l'ONU, qui s'est rendu ensuite au Rwanda voisin.

Ban Ki-moon est arrivé dans l'après-midi à Kigali, où il devait rencontrer le président rwandais Paul Kagame, dont le pays a été à plusieurs reprises accusé - malgré ses démentis répétés- de soutenir la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23) active depuis mai 2012 dans la province congolaise voisine et instable du Nord-Kivu, riche en ressources naturelles.

Lundi, et après plusieurs mois de trêve, les combats ont repris entre l'armée de RDC et le M23 dans la zone de Mutaho, à une dizaine de km de Goma, capitale du Nord-Kivu. Des tirs d'armes lourdes ont atteint la localité de Mugunga, déplaçant environ 30.000 personnes.

Mercredi, Ban Ki-moon s'était dit préoccupé par la reprise des combats et a invité «toutes les parties à régler leur différend de façon pacifique».

Jeudi matin, un calme relatif régnait aux abords de Goma, l'armée et le M23 ayant tacitement décidé d'une trêve pour la visite de Ban Ki-moon qui a annoncé le déploiement «d'ici un ou deux mois» de la brigade d'intervention, dont la création a été votée fin mars par le Conseil de sécurité de l'ONU.

«Vu ce qui se passe, je pense que nous devons accélérer le déploiement (des soldats de la brigade) pour qu'ils soient pleinement à pied d'oeuvre le plus tôt possible», avait déclaré mardi Ban Ki-moon depuis le Mozambique. Mercredi, l'ambassade de France à Kinshasa avait plaidé pour un «déploiement dans les meilleurs délais possible».

Cette brigade doit renforcer la Mission de l'ONU pour la stabilisation de la RDC (Monusco), la plus importante au monde, forte de 17.000 hommes et chargée de la protection des civils. Dotée d'un mandat offensif, elle doit combattre et désarmer les groupes armés dans l'est de la RDC - M23 en tête.

La reprise des combats entre l'armée et le M23, qui s'accusent mutuellement d'avoir relancé les hostilités, intervient alors que les premiers éléments de la brigade - composée de 3000 soldats tanzaniens, malawites et sud-africains - ont commencé à arriver à Goma le 13 mai.

«La brigade d'intervention pourra apporter une certaine sécurité, mais elle seule ne va pas résoudre les causes réelles de la violence en RDC», a averti dans un communiqué publié jeudi Joanna Trevor, directrice associée en RDC de la confédération d'organisations Oxfam.

Selon elle, il faut aussi investir dans des forces de sécurité «fortes et fiables», un pouvoir «au service du peuple» et un système judiciaire obligeant ceux qui violent les droits de l'Homme à en rendre compte.

À Goma, M. Ban a visité l'hôpital Heal Africa, qui prend notamment en charge les victimes de violences sexuelles. D'après William Bonane, médecin à Heal Africa, l'hôpital a recensé 6.500 cas de viols en 2012 et 2.500 au premier trimestre 2013.

Devant l'hôpital, une petite manifestation de femmes a été organisée, a constaté un journaliste de l'AFP. Parmi leurs messages: «Non à Kampala», «Refusons toutes négociations» et «Négociations jusqu'à quand?» - une référence aux pourparlers en cours à Kampala entre gouvernement de RDC et M23.

Fin novembre, le M23 a occupé Goma une dizaine de jours avant de s'en retirer contre la promesse de négociations avec Kinshasa. Début mai, il a suspendu sa participation à ces laborieux pourparlers, exigeant du gouvernement un cessez-le-feu.

La veille, à Kinshasa, M. Ban avait notamment rencontré le président de RDC Joseph Kabila.

À Kigali, il a visité un village accueillant une trentaine d'anciens combattants, blessés de guerre, et leurs familles, issus de divers camps s'étant affrontés au Rwanda: ex-Forces armées rwandaises (FAR) du régime hutu d'avant 1994, Front patriotique rwandais (FPR), l'ex-rébellion de Paul Kagame l'ayant renversé, et Front démocratique de libération du Rwanda (FDLR), groupe armé hostile au régime Kagame toujours actif dans l'est de la RDC.

Dans le cadre de cette tournée dans les Grands-Lacs, le secrétaire général de l'ONU se rendra vendredi à Entebbe (Ouganda), puis à Addis-Abeba, siège de l'Union Africaine, où se tiendront samedi les festivités du cinquantenaire de la création de son ancêtre, l'Organisation de l'unité africaine (OUA).

Il est accompagné de Mary Robinson, envoyée spéciale de l'ONU dans les Grands-Lacs, d'Hervé Ladsous, chargé des opérations de maintien de la paix à l'ONU, et du président de la Banque Mondiale, Jim Yong Kim.

Mercredi, Jim Yong Kim a annoncé une aide d'un milliard de dollars pour les pays des Grands-Lacs, dont la RDC, destinée à des projets liés à l'énergie, l'agriculture, le commerce transfrontalier, la santé et l'emploi.