Au moins 26 personnes ont été massacrées tôt mardi matin par un groupe d'hommes armés dans un foyer universitaire du nord-est du Nigeria, un drame aux motivations encore obscures mais qui s'est déroulé dans une zone où le groupe islamiste Boko Haram est actif.

«A ce stade, nous avons 26 morts confirmés», a déclaré un responsable des secours, sur place dans la ville de Mubi, ajoutant que «quinze blessés ont été transportés à l'hôpital» et que «l'armée a pris le contrôle de la zone».

«Les assaillants connaissaient leurs cibles», a précisé le porte-parole de la police, Mohammed Ibrahim. «Ils ont appelé les victimes par leurs noms dans chacune des maisons où ils sont entrés, et une fois qu'elles s'identifiaient, elles étaient tuées», a-t-il dit à l'AFP. Elles ont été abattues par arme à feu ou égorgées, a-t-il dit.

L'attaque a eu lieu mardi aux premières heures à proximité du campus d'une école polytechnique en périphérie de la ville de Mubi, située dans l'État d'Adamawa. Cet État a déjà été la cible de violences attribuées au groupe islamiste radical Boko Haram.

Mais des responsables n'excluaient pas que le drame soit lié à la tenue d'élections étudiantes, car plusieurs des victimes étaient des candidats à ce scrutin qui avait entraîné des tensions sur le campus.

«Nous n'écartons pas l'éventualité d'une affaire interne (au campus), mais nous ne savons pas encore qui est responsable de ces assassinats», a indiqué le porte-parole de la police. «Nous commençons nos investigations», a-t-il dit.

«Une atmosphère de crise pourrait avoir été alimentée par des tensions politiques sur le campus après une élection à l'école fédérale polytechnique», a ainsi avancé un porte-parole de l'agence nationale chargée de gérer les situations d'urgence, Yushau Shuaib.

«Nous soupçonnons fortement une opération interne», a aussi affirmé le porte-parole de la police.

Mais plusieurs responsables se demandaient comment ces éventuelles tensions entre étudiants auraient pu conduire à une tragédie aussi meurtrière.

Selon le porte-parole de la police, 22 des victimes étaient des étudiants, pour la plupart de l'école polytechnique, mais des gardes de sécurité et un militaire à la retraite ont aussi été tués. La police faisait état d'un bilan de 25 morts, légèrement inférieur à celui des services de secours.

Les regards se tournaient aussi vers le groupe Boko Haram, tenu responsable par l'ONG Human Rights Watch de 1400 morts au Nigeria depuis 2010, et qui est soupçonné de liens avec Al-Qaïda.

L'armée nigériane a revendiqué ces dernières semaines plusieurs succès contre ce groupe, dont trois dirigeants figurent sur la liste noire des «terroristes» du département d'État américain.

La semaine dernière, l'armée avait annoncé avoir tué un des commandants de Boko Haram et avoir arrêté plus de 150 membres du groupe lors d'un raid mené précisément dans la ville de Mubi, où a eu lieu la fusillade mardi.

Mubi est proche de la ville de Maiduguri, dans l'État voisin de Borno, considérée comme le berceau de Boko Haram.

Un couvre-feu avait été décrété à Mubi lors du raid mené par l'armée. Cette mesure était restée en vigueur de de 15H00 jusqu'à 6 heures du matin.

Malgré le maintien du couvre-feu, de nombreux habitants de Mubi préféraient rester chez eux mardi et ceux qui s'aventuraient dans les rues, se déplaçaient avec trois rameaux en signe de paix, a déclaré un habitant, joint au téléphone.

En septembre, Boko Haram avait revendiqué des attaques contre des dizaines d'antennes relais à travers le nord du Nigeria, dont ceux installés à Mubi, rendant très difficiles les communications sur les téléphones portables.

Quelques jours plus tôt, le 17 septembre, l'armée avait annoncé avoir tué le porte-parole du groupe, son visage médiatique qui revendiquait régulièrement ses attentats. Il était connu sous le nom d'Abul Qaqa.

Mais le chef présumé de Boko Haram, Abubakar Shekau, est apparu lundi sur une vidéo postée sur le site YouTube, démentant des infomations qui l'avaient donné lui aussi pour mort.

«Je suis vivant, en bonne santé et plein de vitalité, il ne m'est rien arrivé», avait-t-il affirmé, en même temps qu'il menaçait de représailles après la diffusion le mois dernier du film islamophobe, «l'Innocence des musulmans».

Dans une adresse à la Nation pour le 52e anniversaire de l'indépendance du pays, le président Goodluck Jonathan avait demandé à ses concitoyens de garder foi et confiance dans le pays, en dépit de la pauvreté persistante, de la corruption et de la violence.

Les attentats commis par Boko Haram ont accentué la division du pays le plus peuplé d'Afrique (plus de 160 millions d'habitants) entre le Nord musulman, où le groupe radical veut établir un État islamique, et le Sud chrétien.