Le nouveau président de l'Égypte, Mohammed Morsi, a fait ses premiers pas mercredi aux Nations unies, où il a affirmé qu'il ne se reposerait pas tant que la guerre en Syrie ne serait pas terminée.

Il a qualifié la crise en Syrie de «tragédie de notre ère», invitant tous les pays du monde à se joindre aux efforts pour mettre un terme au bain de sang.

M. Morsi, issu du parti des Frères musulmans, une organisation longtemps interdite en Égypte, a commencé son discours devant l'Assemblée générale en affirmant qu'il était le premier président égyptien démocratiquement élu, soulignant qu'il était arrivé au pouvoir après «une grande révolution pacifique».

Il a estimé que l'ONU devait se pencher en priorité sur le respect des droits des Palestiniens.

«Les fruits de la dignité et de la liberté ne doivent pas rester hors de portée du peuple palestinien», a-t-il déclaré, en ajoutant qu'il était «honteux» que les résolutions de l'ONU ne soient pas appliquées. Il a condamné la politique de colonisation israélienne sur des terres de Cisjordanie que les Palestiniens revendiquent pour leur futur État.

M. Morsi a également qualifié d'«obscénité» le film islamophobe «Innocence of Muslims» tourné aux États-Unis, considéré comme insultant envers le prophète de l'islam. Il a affirmé que la liberté d'expression n'autorisait pas les attaques contre les religions.

Le président égyptien a aussi condamné les violences qui ont touché plusieurs pays musulmans la semaine dernière en réaction au film. Au moins 51 personnes ont été tuées dans différents pays depuis le début des manifestations le 11 septembre, dont l'ambassadeur des États-Unis en Libye.

Mohammed Morsi semblait ainsi répondre au discours du président américain Barack Obama devant l'Assemblée générale mardi, dans lequel il avait condamné le film, tout en défendant la liberté d'expression protégée par la Constitution des États-Unis.

M. Morsi n'a pas dit quelles devraient être, selon lui, les limites de la liberté d'expression, mais a déclaré que le film et les violentes réactions qu'il a suscitées méritaient «réflexion». Il a estimé que la liberté d'expression impliquait une responsabilité, «en particulier quand cela vient avec de sérieuses implications pour la paix et la stabilité internationales».

Plus tôt dans la journée, le président de l'Iran, Mahmoud Ahmadinejad, connu pour ses discours incendiaires contre Israël et les États-Unis, avait longuement parlé de sa vision d'un nouvel ordre mondial sans «l'hégémonie de l'arrogance». Au sujet d'Israël, il a dénoncé la «menace continue des sionistes barbares de recourir à une intervention militaire contre notre grande nation». Mais il n'a pas parlé du programme nucléaire iranien.

Les délégations israélienne, américaine et canadienne ont quitté la salle au début du discours du président iranien.

«Il est particulièrement fâcheux que M. Ahmadinejad ait une plate-forme à l'Assemblée générale de l'ONU le jour de Yom Kippour», considéré comme le jour le plus important du calendrier juif, a affirmé Erin Pelton, porte-parole de la mission américaine à l'ONU.

Des milliers de personnes ont manifesté contre le régime iranien près du siège des Nations unies à New York pendant que le président Ahmadinejad s'exprimait. Des Syriens étaient également réunis pour dénoncer le soutien de Téhéran au régime du président syrien Bachar el-Assad.

Un deuxième dirigeant arrivé au pouvoir dans la foulée du Printemps arabe a fait son entrée mercredi à l'Assemblée générale de l'ONU: le président yéménite Abed Rabbo Mansour Hadi, qui a succédé à Ali Abdallah Saleh en février, à l'issue d'un an de crise politique.

M. Mansour Hadi, chargé de conduire la transition démocratique dans son pays, a appelé à un processus similaire en Syrie, estimant que «la seule solution pour nos frères de Syrie est d'accepter un plan (...) permettant un changement pacifique et un transfert du pouvoir par les urnes». Il a également appelé l'ONU à reconnaître la Palestine comme État membre.

Les membres du Conseil de sécurité de l'ONU ont par ailleurs discuté, mercredi, des changements dans le monde arabe à l'ouverture de la réunion des ministres.

À l'heure où les vetos de la Russie et de la Chine bloquent l'action du Conseil de sécurité sur le dossier syrien, l'ambassadeur allemand aux Nations unies, Peter Wittig, a souhaité que le Conseil se consacre à quelque chose de nouveau et de positif, à savoir «l'émergence de la Ligue arabe comme un acteur régional qui a fait la preuve de son rôle essentiel dans la résolution des conflits».

La Ligue, qui rassemble 21 États, s'est émancipée des régimes dictatoriaux et cherche à se transformer après les bouleversements du Printemps arabe. L'organisation a ainsi soutenu les rebelles qui ont renversé le dictateur libyen Mouammar Kadhafi l'an dernier et a suspendu la Syrie de ses rangs en réaction à la violente répression du soulèvement par le régime de Bachar el-Assad.

La Ligue arabe «promeut les valeurs défendues par les Nations unies, à savoir les droits de la personne, l'État de droit, la démocratie et le pluralisme», mais aussi la lutte contre la corruption et la promotion économique, a estimé l'ambassadeur Wittig.

La journée de jeudi à l'Assemblée générale de l'ONU devrait notamment être marquée par le discours du premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou.