Le président sud-africain Jacob Zuma s'est défendu dimanche de copier les méthodes de l'apartheid après l'envoi en force de la police pour empêcher des manifestations de mineurs en grève, un mois après la fusillade qui avait fait 34 morts à Marikana (nord).

«L'État intervient à Marikana uniquement pour mettre un terme à la violence et à l'intimidation», a souligné le président Zuma, affirmant agir «comme dans n'importe quel pays démocratique du monde».

«Les travailleurs ont le droit de négocier avec leurs employeurs sur les salaires et les conditions de travail et l'État ne prend pas parti dans le conflit», a ajouté M. Zuma, accusé de tourner le dos aux intérêts des mineurs.

C'est dans ce contexte social tendu que le président sud-africain ouvrira lundi matin le congrès du Cosatu, la grande confédération syndicale du pays, dont la fédération minière, le NUM, n'est jamais apparue aussi contestée par sa base.

Dimanche matin, les forces de l'ordre, qui ont reçu du gouvernement la consigne de mettre un terme aux troubles dans le bassin minier de Rustenburg, avaient bloqué une nouvelle manifestation de mineurs du secteur du platine dans cette zone vitale pour l'économie nationale.

Barrant la route avec des véhicules blindés, la police a sommé les manifestants de quitter les lieux. Ces derniers ont obtempéré par peur de nouveaux affrontements.

Les mineurs, venus sans armes ni bâtons, voulaient marcher «pacifiquement» vers le poste de police pour protester contre les violences de la veille.

Samedi, la police avait opéré une spectaculaire descente nocturne dans les logements de Marikana, y confisquant armes blanches et bâtons. Les forces de l'ordre avaient ensuite dispersé un rassemblement de mineurs, usant de gaz lacrymogènes et tirant des balles en caoutchouc qui ont fait plusieurs blessés.

Dimanche, tandis que la manifestation se dispersait, un mineur, Lunsstone Bonase, 32 ans, affirmait aux journalistes : «Le gouvernement est contre le peuple et permet qu'on tue des gens (...) Est-ce qu'on va travailler comme sous l'apartheid ? Ils nous forcent à retourner au travail, comme ils le faisaient sous l'apartheid».

Les références au régime raciste et répressif de l'apartheid, disparu en 1994, se sont multipliées depuis que la police a tué 34 mineurs en grève le 16 août à Marikana, sur le site exploité par le Britannique Lonmin. Les grévistes réclamaient un triplement de leurs salaires, à 12 500 rands mensuels (1160 euros).

Samedi, l'évêque anglican Jo Seoka, médiateur dans les pourparlers entre les mineurs et leur direction, a mis en garde le pouvoir : «Le gouvernement doit être fou pour croire que ce qui ressemble pour moi à la répression du temps de l'apartheid, puisse réussir».

«Le gouvernement ne peut pas tolérer une situation dans laquelle les gens manifestent dans les rues avec des armes dangereuses», a rétorqué M. Zuma.

Il a assuré que «le gouvernement comprenait pleinement la détresse des pauvres et de la classe ouvrière du pays». Il a sommé les compagnies minières d'agir «immédiatement» pour se mettre en règle et notamment améliorer les logements. Une demande assortie toutefois d'aucune menace de retirer leurs licences aux compagnies.

L'agitation sociale dans les mines, qui touche essentiellement la ceinture de platine autour de Rustenburg --d'où les multinationales du secteur extraient plus d'un cinquième de la production mondiale-- a débuté après le massacre du 16 août à Marikana.

Depuis, les mineurs d'autres sites ont réclamé les mêmes augmentations de salaire et, face aux risques de violence, les majors du platine ont fermé un à un leurs puits dans la région. L'activité devait reprendre lundi chez le géant australien Aquarius, et mardi chez Amplats, filiale du groupe Anglo American selon un communiqué.

Chez Lonmin, les négociations doivent reprendre lundi dans un lieu éloigné du site où depuis le 10 août, 3000 foreurs refusent de redescendre sous terre.