Le Comité international olympique a plongé la plus jeune nation du monde dans la consternation en décidant que les athlètes sud-soudanais ne pourraient participer aux Jeux de Londres que sous le drapeau du Soudan, dont Juba s'est séparé il y a un an après une longue guerre civile.    

« Le sentiment ici est que le CIO est très conservateur et indifférent à l'égard du peuple du Soudan du Sud », a déclaré à l'AFP le ministre sud-soudanais des Sports Cireno Hiteng Ofuho à quelques jours de l'ouverture des Jeux le 27 juillet.

« À quoi bon être indépendants s'ils nous traitent ainsi? », a-t-il ajouté.

Les appels du président sud-soudanais Salva Kiir pour que les athlètes de la jeune nation puissent participer aux JO sont restés lettre morte, a-t-il rappelé.

« Notre président avait même écrit au président du CIO, Jacques Rogge, lui demandant de faire preuve de compréhension », le 28 juin, mais il a essuyé une réponse négative.

« Désolé, mais à cause de procédures strictes, l'enregistrement d'un pays nécessite deux ans », a écrit le responsable olympique.

Et même si participer à Londres pourrait constituer une première pour des athlètes sud-soudanais en tant que telle, il n'est pas question d'aller aux Jeux aux dépens de la fierté nationale.

« Puisque nous sommes indépendants, nous n'irons pas sous le drapeau du Nord. Je ne vois personne pour être d'accord avec cette idée », a déclaré Gatluak Kual Luak, président de l'équipe paralympique de basket-ball.

M. Ofuho regrette aussi que les athlètes sud-soudanais ne puissent pas arborer le drapeau olympique, comme ceux du Timor oriental aux JO-2000, un an après l'indépendance du petit pays océanien.

« Le CIO ne nous a rien dit du tout à ce sujet. Nous sommes très tristes », a-t-il déclaré.

Il est particulièrement furieux que le marathonien vedette de 28 ans Guor Marial, qui a perdu plusieurs frères et soeurs et s'est réfugié aux États-Unis, rate probablement les Jeux de Londres.

« Pas juste une compétition »

Il ne peut pas courir pour les États-Unis tant qu'il n'a pas la nationalité américaine et sa reconnaissance comme Sud-Soudanais est dans les limbes.

« C'est très difficile. Personne n'a été en contact aux États-Unis. Il lui fallait un passeport et nous ne pouvons pas lui en fournir un en quatre jours », notamment parce qu'il faut son empreinte digitale, explique M. Ofuho.

« Nous avons Marial Guor, mais aussi d'autres athlètes de la diaspora en Australie qui ont été qualifiés pour les Jeux, mais qui ont refusé de participer sous le drapeau australien. Ils veulent représenter le Soudan du Sud », a-t-il ajouté.

Le pays, devenu cette année le plus jeune membre de l'Union africaine et de l'ONU, a aussi rejoint la Fédération internationale de football (FIFA).

Le Soudan du Sud a joué le 10 juillet son premier match amical international contre l'Ouganda, un jour après avoir fêté le premier anniversaire de son indépendance. Des équipes ont aussi participé à des matchs de la Coupe d'Afrique de l'Est et du centre (CECAFA).

« La FIFA a même dû modifier les règles pour nous permettre d'être accueillis, mais les dirigeants du CIO sont trop conservateurs », a déclaré M. Ofuho.

Le pays a aussi une équipe de basket en fauteuil roulant, composée de « personnes blessées par des mines, des armes à feu, ou qui souffrent de la polio », mais elle attend toujours de savoir si elle pourra participer aux Jeux paralympiques, du 29 août au 9 septembre à Londres, selon M. Luak, qui ne peut supporter l'idée qu'aucun Sud-Soudanais ne soit présent à Londres.

« Participer aux Jeux olympiques est très important. Ce n'est pas juste une compétition, mais c'est aussi la représentation du Soudan du Sud. Il est important d'être perçu comme une nation, à Londres, sur une scène internationale », a-t-il insisté.