Le président burkinabé et cinq chefs d'État de la région ont retrouvé samedi à Ouagadougou les «forces vives» du Mali afin d'installer un gouvernement d'union à Bamako apte à affronter la crise dans le Nord tenu par les «terroristes», mais en l'absence des autorités de transition.

«La réflexion sur la formation d'un gouvernement consensuel au Mali, la sécurisation des institutions» et la «protection» du président intérimaire «constituent des objectifs majeurs», a déclaré à l'ouverture du sommet le chef de l'État burkinabé Blaise Compaoré, médiateur pour la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CÉDÉAO), jugeant «précaire et fragile» la situation institutionnelle à Bamako.

Ni le président de transition Dioncounda Traoré, officiellement retenu pour des soins à Paris à la suite d'une grave agression fin mai dans ses bureaux par une foule de manifestants hostiles, ni le premier ministre Cheick Modibo Diarra, aux relations notoirement tendues avec la CÉDÉAO, n'ont fait le déplacement.

Les autorités intérimaires maliennes, installées après le putsch du 22 mars qui a précipité la chute du Nord aux mains de groupes armés surtout islamistes, sont seulement représentées par la ministre de l'Intégration africaine Rokia Traoré.

M. Compaoré a appelé à des «dispositions urgentes» pour «faire face au péril terroriste» dans le Nord, où la situation humanitaire connaît une «dégradation continue».

«Nous ne pouvons tolérer la partition de ce pays frère qu'est le Mali», a affirmé le chef de l'État ivoirien Alassane Ouattara, président en exercice de la CÉDÉAO.

Pour un retour rapide du président Traoré

Selon lui, «un retour rapide à Bamako du président intérimaire», déjà réclamé par la CÉDÉAO fin juin, et un «gouvernement de large union nationale, avec un agenda et un cadre précis et sécurisé» pour la transition d'un an, doivent contribuer à «ressouder la nation malienne pour un retour programmé et réussi vers la démocratie et l'intégrité territoriale du Mali».

Avant des discussions entre eux à huis clos, MM. Compaoré et Ouattara et leurs homologues du Niger, du Togo, du Bénin et du Nigeria se sont entretenus durant environ deux heures avec des représentants de la classe politique, des communautés religieuses et des syndicats, notamment.

Mais les organisations ayant appuyé le coup d'État militaire ont refusé de venir à une réunion «de plus». Elles ont tenu une réunion samedi à Bamako rassemblant au moins 25O de leurs partisans pour protester contre le sommet et rappeler à la CÉDÉAO que «le Mali est un pays souverain» et que tout gouvernement d'union «doit être fait au Mali» même.

Dans le Nord, les islamistes radicaux alliés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) sont désormais les maîtres du jeu après avoir mis en déroute les rebelles touareg qui avaient lancé l'offensive en janvier contre l'armée malienne.

Ces islamistes ont choqué le monde entier en détruisant des lieux saints musulmans à Tombouctou (nord-ouest), mythique «perle du désert» classée par l'UNESCO patrimoine mondial en péril, tandis que la situation humanitaire devient chaque jour plus difficile (violences contre les femmes et les enfants, problèmes d'eau et d'électricité, etc.).

La CÉDÉAO se prépare à une éventuelle intervention armée régionale pour restaurer l'intégrité territoriale du pays - une mission technique vient d'ailleurs d'arriver à Bamako -, mais cette opération complexe, lourde et coûteuse tarde à recueillir l'onction de l'ONU.

Dans une résolution adoptée jeudi, le Conseil de sécurité «soutient pleinement» les efforts de la CÉDÉAO et de l'Union africaine et prône des sanctions contre les alliés d'Al-Qaïda, mais ne donne pas encore de mandat pour une telle force.

Parallèlement au sommet de Ouagadougou, la situation au Mali doit être également au coeur de discussions entre le chef de la diplomatie mauritanienne Hamadi Ould Baba Ould Hamadi, arrivé samedi à Alger, et son homologue algérien Mourad Medelci. Jugée incontournable dans le règlement de la crise malienne, l'Algérie est de plus en plus sollicitée.