Au moins 36 personnes ont été tuées dimanche dans des attentats contre trois églises de l'État de Kaduna (nord du Nigeria) et les émeutes de chrétiens en colère qui ont suivi, dans une région régulièrement secouée par les violences du groupe islamiste Boko Haram.

Selon la police, 16 personnes ont été tuées dans les explosions dans les trois églises et un responsable de la Croix Rouge dans la ville de Kaduna, a indiqué de son côté à l'AFP que les secours avaient «pour l'instant récupéré les corps de 20 personnes» tuées dans émeutes, pour la plupart brûlées vives.Â

Un précédent bilan faisait état de 21 morts et 101 blessés.

Les attentats, dont des attaques suicide, ont eu lieu en un intervalle de près d'une heure à Zaria et Kaduna, les deux principales villes de l'État du même nom, où un couvre-feu immédiat de 24 heures a été décrété par les autorités locales.

«Des attentats suicides ont visé des églises des quartiers de Wusasa et Sabongari de (la ville de) Zaria, ainsi que dans le quartier de Trikania à Kaduna», a indiqué un porte-parole de la police de l'État, Aminu Lawan.

Deux autres explosions ont ensuite visé deux églises de Kaduna, dans les quartiers de Nassarawa et Barnawa, au sud de la ville, a affirmé un responsable de la NEMA. Mais la police n'a pas confirmé ces possibles attaques ni leurs objectifs supposés.

À Zaria, les explosions ont visé vers 8H35 à dix minutes d'intervalle la cathédrale catholique du Christ Roi et l'église évangélique de la Bonne Nouvelle. À Kaduna, c'est l'église de Shalom qui a été visée vers 9H30, dans des faubourgs sud de la ville à majorité chrétienne.

«Au total, seize personnes sont mortes du fait des explosions dans les trois églises», a précisé dans un communiqué un porte-parole de la police, Frank Mba.

«J'ai vu une voiture foncer vers l'église (de Shalom), elle a tout de suite explosé, tuant un soldat et deux gardes de sécurité», a raconté un témoin à Kaduna, Joseph Emmanuel.

Ces attaques n'ont pas été revendiquées, mais le groupe islamiste Boko Haram, auteur de nombreux attentats anti-chrétiens, a récemment déclaré qu'il continuerait à s'en prendre aux églises.

À Zaria, une fidèle du quartier de Wusasa a dit que «beaucoup de gens dans l'église avaient été blessés». À Sabongari, dans la même ville, un habitant a rapporté que l'église avait été gravement endommagée. «Il est évident qu'il y a des morts vue l'ampleur des dégâts et le feu», a dit Mahmud Hamza à l'AFP.

Un autre habitant a ajouté que des «corps apparemment sans vie vus de loin étaient retirés de l'église».

Des foules de chrétiens en colère se sont ensuite livré à des représailles contre des musulmans dans un faubourg majoritairement chrétien de la ville de Kaduna.

Les émeutiers, essentiellement des jeunes chrétiens, ont monté des barricades sur la grande route menant au sud vers la capitale fédérale Abuja, notamment dans les localités de Trijania, Gonin Gora et Sabon Tasha, s'en prenant aux automobilistes ressemblant à des musulmans.

Un correspondant de l'AFP a vu dix cadavres de ces victimes lynchées et évacués vers la morgue, a constaté un correspondant de l'AFP.

Dimanche dernier déjà, des attentats revendiqués par les islamistes de Boko Haram avaient visé deux églises du centre et du nord-est du Nigeria, faisant quatre morts, dont un kamikaze, et une cinquantaine de blessés.

Un porte-parole des islamistes avait déclaré que ces attaques voulaient démontrer que le groupe restait actif malgré les opérations de répression des forces de sécurité.

«L'État nigérian et les chrétiens sont nos ennemis et nous lancerons des attaques contre l'État et son appareil sécuritaire ainsi que contre les églises jusqu'à ce que nous achevions notre but qui est d'établir un État islamique à la place de l'État laïc», avait-il dit.

Le Saint-Siège a vigoureusement condamné ces nouveaux attentats contre des lieux de culte chrétiens et leur «caractère systématique», «signe d'un dessein absurde de haine».

Boko Haram multiplie depuis mi-2009 les attentats notamment dans les villes du nord à majorité musulmane qui ont fait plus d'un millier de morts. Ces attaques visent essentiellement les membres des forces de sécurité, les responsables gouvernementaux et les lieux de culte chrétiens.

Le Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique avec quelque 160 millions d'habitants, est divisé entre un nord majoritairement musulman et un sud à dominante chrétienne plus riche grâce au pétrole.