Un accrochage entre rebelles touareg et islamistes a eu lieu dans la nuit de jeudi à vendredi près de Kidal, une ville du nord du Mali, au moment où l'Union africaine (UA) s'apprête à demander à l'ONU un appui pour une intervention militaire dans cette région.

Des combattants de la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) et du groupe islamiste Ansar Dine « se sont affrontés » dans la nuit à une vingtaine de kilomètres de Kidal, a indiqué à l'AFP par téléphone un fonctionnaire de la ville, évoquant des tirs nourris d'armes automatiques.

C'est le premier incident sérieux entre ces groupes depuis plus de deux mois que l'immense région nord-est contrôlée par le MNLA et surtout Ansar Dine et son allié djihadiste d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).

Le calme est revenu à l'aube, a affirmé le fonctionnaire. Selon lui, « il y a eu trois blessés » dans cet accrochage, une information qu'il n'était pas possible de confirmer pour l'heure.

« Les quelques drapeaux du MNLA qui flottaient dans la ville ont été enlevés », « on ne voit plus qu'Ansar Dine en ville », a ajouté cet habitant.

Interrogé par téléphone satellitaire dans la nuit, Mohamed Ag Mamoud, un combattant d'Ansar Dine, avait expliqué cet accrochage par le fait que « toute cette semaine, le MNLA a manipulé à Kidal des civils qui ont manifesté » contre le mouvement islamiste.

Les 5 et 6 juin, des habitants de cette ville, surtout des femmes et des jeunes, avaient manifesté contre la présence des islamistes et dit leur soutien au MNLA. La première manifestation avait été violemment dispersée.

Cependant, dans les deux camps on s'est employé vendredi à minimiser l'incident de la nuit dernière.

« Il n'y a rien eu de grave », simplement « quelques coups de feu », a affirmé un haut responsable du groupe islamiste à Kidal. Mossa Ag Attaher, porte-parole du MNLA basé à Paris, a carrément démenti tout « échange de tirs ».

Un projet de fusion entre le MNLA, au départ sécessionniste et laïc, et Ansar Dine, qui prône la charia (loi islamique) dans tout le Mali, a été suspendu en raison de fortes divergences sur la question de l'application de la charia. Mais aucun des deux mouvements n'a jusqu'à présent voulu parler d'échec ou de rupture.

Saisine de l'ONU

Pour régler la crise dans le Nord, qui a échappé fin mars au pouvoir central, « toutes les options sont possibles, nationales comme internationales », a expliqué à l'AFP le porte-parole du gouvernement malien de transition, Hamadoun Touré, interrogé sur les dernières décisions des instances africaines. « Nous sommes en train d'analyser l'évolution de la situation », a-t-il dit, sans autre commentaire.

L'UA va saisir l'ONU pour obtenir son « appui » à une intervention militaire dans le nord du Mali, avaient annoncé jeudi soir à Abidjan des responsables des Nations unies, de l'UA et de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (CÉDÉAO), réunis dans le « groupe de soutien et de suivi sur la situation au Mali ».

Les participants ont promis un appui notamment « financier » et « logistique » pour aider l'État malien à reprendre cette région « dans les plus brefs délais possible ».

À l'issue d'une réunion de chefs d'État mercredi à Lomé, la CÉDÉAO avait « réaffirmé » sa décision d'envoyer des troupes au Mali et décidé d'une saisine du Conseil de sécurité de l'ONU. Cette idée avait été lancée le 30 mai par le chef de l'État béninois et président en exercice de l'UA, Thomas Boni Yayi.

Mais les contours, les composantes et le mandat exact d'une éventuelle opération militaire dans le Nord malien ne sont toujours pas déterminés.

L'ONU, l'UA et la CÉDÉAO ont aussi « exigé » que l'ex-junte militaire installée après le putsch du 22 mars à Bamako « soit immédiatement dissoute et se retire complètement de la gestion de la transition ».

Les putschistes se sont officiellement retirés en vertu d'un accord conclu le 20 mai avec la CÉDÉAO, mais ils restent très présents face au président intérimaire Dioncounda Traoré et au gouvernement, en place pour une transition d'un an et dont l'un des défis majeurs est la reconquête du Nord.