Le président soudanais Omar el-Béchir a menacé mercredi de renverser le gouvernement du Soudan du Sud, alors que s'accentuent les pressions internationales pour décourager les deux voisins de se lancer dans une guerre ouverte après l'invasion par le Sud d'une zone pétrolifère.

«Notre principal objectif à partir d'aujourd'hui est de libérer les citoyens du Soudan du Sud du SPLM», a déclaré au siège de son parti M. Béchir, en référence au Mouvement populaire de libération du Soudan au pouvoir à Juba depuis la partition du pays en juillet 2011.

«Nous le considérons comme un insecte (...) cherchant à détruire le Soudan et notre principal but désormais est d'éliminer complètement cet insecte», a-t-il ajouté.

Il s'exprimait à l'occasion d'un rassemblement de soutien aux troupes soudanaises qui tentent de reconquérir la zone frontalière de Heglig, où se trouve le principal champ pétrolier du pays, tombée aux mains du Soudan du Sud il y a une semaine.

«Il y a deux options: soit nous finissons à Juba, soit ils finissent à Khartoum. Nous ne pouvons cohabiter au sein des anciennes frontières» du Soudan unifié, a-t-il déclaré, prédisant une victoire rapide.

«Nous ne nous arrêterons pas à Heglig. Nous nous arrêterons à Juba», capitale du Soudan du Sud, a clamé le président soudanais devant 3000 jeunes, certains en treillis, reprenant des chants martiaux.

Un peu plus tôt, Omar Dahab, le chef de la cellule de crise du ministère des Affaires étrangères soudanais, avait indiqué que son pays allait reconquérir «de gré ou de force» la région de Heglig, considérée par la communauté internationale comme étant située en territoire soudanais, ce que Juba conteste.

L'armée soudanaise avait annoncé vendredi avoir lancé une contre-attaque pour reprendre Heglig, malgré les appels internationaux à la retenue.

L'armée a affirmé samedi que ses forces se trouvaient à quelques kilomètres de la ville d'Heglig, mais n'a plus diffusé d'information concrète sur la situation sur le terrain depuis.

Les heurts dans cette région ont éclaté en mars et dégénéré, avec une série de bombardements aériens sur le Sud et la prise de la zone pétrolifère par les forces sud-soudanaises, aidées selon Khartoum par des groupes rebelles du Darfour.

La communauté internationale, notamment les Nations unies, les États-Unis et l'Union européenne, ont critiqué l'occupation de Heglig et dénoncé dans le même temps les raids aériens de Khartoum contre son voisin.

Il y a de fortes craintes que ces combats, les plus violents entre les deux voisins depuis l'indépendance du Soudan du Sud en juillet à l'issue de deux décennies de guerre civile, ne fassent tache d'huile.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a évoqué mardi l'éventualité de sanctions contre le Soudan et le Soudan du Sud pour les convaincre de sortir de leur «logique de guerre», selon des diplomates.

Selon l'ambassadrice américaine Susan Rice, les 15 pays membres du Conseil ont de nouveau demandé que les troupes du Soudan du Sud se retirent de Heglig et que le Soudan cesse ses bombardements aériens.

Les éventuelles sanctions sont «injustes» car elles devraient «logiquement viser l'agresseur» (Juba, NDLR), a indiqué M. Dahab, estimant que le devoir des Nations unies était «de mettre fin à l'occupation par le Soudan du Sud de territoire appartenant à un État indépendant et souverain».

L'Union africaine a pour sa part demandé aux deux forces en présence de quitter la région contestée, appelant «les deux pays à prendre des mesures immédiates pour réduire les tensions, et à agir de manière responsable dans un esprit de coopération».

L'émissaire américain pour le Soudan et le Soudan du Sud, Princeton Lyman, était attendu à Khartoum jeudi, après avoir déjà rencontré le président sud-soudanais Salva Kiir à Juba, pour tenter d'apaiser les tensions.