Ellen Johnson Sirleaf, première femme élue d'Afrique en 2005 et prix Nobel de la paix 2011, a été investie lundi pour un second mandat à la tête du Liberia, avec l'assurance que ses opposants, qui contestaient sa réélection, reconnaissent désormais son pouvoir.

«Nous avons gagné une place légitime en tant que phare de la démocratie, un pays d'espoir et d'opportunités», a-t-elle déclaré, en présence de la secrétaire d'État américaine Hillary Clinton et de plusieurs présidents africains.

«Les clivages ayant conduit à des décennies de guerres sont encore profonds, mais l'aspiration à la réconciliation l'est tout autant», a-t-elle ajouté après avoir prêté serment pour un nouveau mandat de six ans.

Mme Sirleaf, 73 ans, a été réélue le 8 novembre lors d'un scrutin boycotté par son principal rival Winston Tubman, après la répression d'une manifestation d'opposants qui avait fait au moins deux morts.

Elle entame cependant son nouveau mandat sous un bon signe, M. Tubman lui ayant finalement apporté son soutien dimanche.

Selon cet homme politique qui s'est illustré récemment par des prises de position à géométrie variable, la reconnaissance de la victoire de Mme Sirleaf a été décidée à la suite de discussions avec elle et bouclées samedi.

Il a donc décidé d'annuler l'appel à manifester le jour de l'investiture, estimant que désormais son pays «doit aller vers la paix et que la réconciliation doit prévaloir».

Outre Mme Clinton, plusieurs présidents ouest-africains -Alassane Ouattara (Côte d'Ivoire), Alpha Condé (Guinée), Ernest Koroma (Sierra Leone), Abdoulaye Wade (Sénégal)- ont assisté à l'investiture à Monrovia, capitale d'un pays qui porte encore les stigmates de 14 ans de guerres civiles (1989-2003) ayant fait quelque 250 000 morts.

La cérémonie d'investiture a été marquée par différents chants et danses, et a été suivie par des milliers de personnes, dans une ville placée sous haute surveillance par les forces de sécurité libériennes et onusiennes.

En inaugurant après l'investiture la nouvelle ambassade des États-Unis à Monrovia, Mme Clinton a estimé que la corruption était «un des obstacles à une plus grande prospérité du Liberia», tout en reconnaissant les grands progrès accomplis depuis la fin du conflit.

Continuer à reconstruire

Première Africaine démocratiquement élue chef d'État, Mme Sirleaf s'est engagée à panser les plaies de son pays, ce qui a contribué à son prix Nobel de la paix, qu'elle partage avec une de sa compatriote, la militante pacifiste Leymah Gbowee, et une journaliste yéménite, Tawakkol Karman.

Après sa réélection, elle a confié à Mme Gbowee le soin de conduire une initiative de réconciliation nationale, un sujet qu'elle a évoqué dans son discours lundi.

Ce programme de réconciliation ne doit pas se baser sur des considérations liées à «la tribu, la région, la religion ou l'ethnie, mais sur l'égalité des chances et d'un meilleur avenir pour tous les Libériens», a-t-elle dit.

Cela signifie «créer des emplois» et pour ce faire, le gouvernement devrait offrir aux jeunes une bonne éducation pour leur permettre d'avoir» un travail, et connaître «la dignité de recevoir un salaire décent», a-t-elle ajouté.

Économiste, ex-haut fonctionnaire international et ex-ministre des Finances, Ellen Johnson Sirleaf a redressé l'économie du pays. Son action politique est marquée par la lutte contre la corruption et par de profondes réformes institutionnelles, lui valant l'estime de la communauté internationale.

Au Liberia cependant, il lui est reproché d'avoir été indirectement impliquée dans les guerres civiles, de ne pas avoir assez oeuvré à la réconciliation et de ne pas avoir su capitaliser sur sa bonne image à l'étranger.

Pour son second mandat, elle a affirmé vouloir poursuivre la reconstruction du pays, où la majorité des 4 millions d'habitants vit dans la pauvreté et qui, selon elle, a «encore un long chemin à parcourir».