De nouveaux affrontements entre deux ethnies rivales ont fait 57 morts, en majorité des femmes et des enfants, dans le sud-est du Soudan du Sud, a déclaré jeudi un ministre de ce jeune État formé il y a moins d'un an et fragilisé par des violences tribales.

«Cinquante-sept personnes ont été tuées et la plupart sont des femmes et des enfants. Il n'y a que onze hommes parmi eux», a dit le ministre de l'Information Barnaba Marial Benjamin. Il a ajouté que 53 autres personnes avaient été tuées dans l'attaque survenue mercredi d'un village de l'État du Jonglei.

Une soixantaine de membres de la tribu des Murle revêtus d'uniformes militaires ont lancé un raid sur le village de Wek dans le comté d'Uror, emmenant plus de 20 000 vaches appartenant à la tribu rivale des Lou Nuer, a ajouté le responsable.

«Les Murle ont attaqué de 17h (9h heure du Québec) à minuit. Cela explique que tant de familles aient été tuées chez elles», a dit M. Benjamin, sans pouvoir dire s'il s'agissait de déserteurs de l'armée.

La région est le théâtre d'une longue vendetta entre les deux tribus qui a fait de très nombreux morts.

Dans le seul État de Jonglei, les attaques de campements visant à voler des bêtes et les opérations de représailles ont fait en 2011 plus de 1100 morts et forcé quelque 63 000 personnes à quitter leur village, selon un rapport de l'ONU. En août, au moins 600 personnes ont été tuées et 985 blessés lors d'une attaque de Murle contre des villages Lou Nuer.

«Il s'agit d'une revanche. Il ne fait pas de doute qu'ils viennent attaquer les Lou Nuer», a ajouté le ministre à propos du dernier épisode meurtrier.

Lundi encore, on apprenait de responsables locaux que 24 personnes avaient été tuées au cours de violences tribales dans le Jonglei.

L'État se relevait à peine de l'attaque ces dernières semaines de villages de Murle, autour de la localité de Pibor, par environ 8000 jeunes hommes armés des Lou Nuer, pour des histoires de vols de bétail.

Des dizaines de milliers de personnes ont dû fuir et le bilan exact des victimes n'est pas connu.

La coordinatrice humanitaire de l'ONU pour le Soudan du Sud, Lise Grande, a dit que «des dizaines, peut-être des centaines» de personnes pourraient avoir été tuées. Joshua Konyi, commissaire du comté de Pibor et lui-même d'ethnie Murle, a de son côté affirmé que 3141 personnes étaient mortes, un bilan qui n'a pas été confirmé par d'autres sources.

Suite à cette explosion de violence, le gouvernement a décrété Jonglei «zone de désastre» national tandis que les Nations unies ont annoncé «une opération massive d'urgence» pour venir en aide aux 60 000 personnes déracinées par la violence.

Jeudi, Médecins Sans Frontières a dit de son côté avoir transféré par avion 12 blessés de Wek jusqu'à son hôpital de Nasir, dans l'État voisin du Nil supérieur.

«Cinq femmes adultes et un homme ont des blessures par balles et les six autres patients, des enfants de moins de cinq ans, ont reçu des coups ou des balles», a dit MSF dans un communiqué.

Le chef de mission de l'ONG, Jose Hulsenbeck, s'est dit «choqué par le nombre de femmes et d'enfants blessés».

Le ministre Benjamin a déclaré qu'une centaine de soldats avaient été envoyés dans cette région reculée du Jonglei depuis la base de Wat, à une cinquantaine de kilomètres, et que d'autres suivraient.

Le Jonglei a été l'une des zones les plus affectées par la guerre civile qui a ravagé pendant deux décennies le Soudan et a pris fin en 2005. L'accord de paix signé alors a mené à l'indépendance du Soudan du Sud le 9 juillet dernier.