Les É.-U. ont mis en garde contre de possibles attentats au Nigeria après un assaut d'islamistes radicaux ayant fait au moins 150 morts vendredi dans le nord-est, où les habitants ont célébré  dimanche la fête musulmane de l'Aïd al-Adha dans la peur et la tristesse.

Vendredi soir, la ville de Damaturu a été secouée par plusieurs attaques contre des postes de police et des églises, dont une menée par un kamikaze en voiture. Au moins 150 personnes ont été tuées et une centaine blessées dans ces «actes atroces» dénoncés par le président Goodluck Jonathan et revendiqués par la secte islamiste radicale Boko Haram.

L'ambassade des États-Unis au Nigeria a mis en garde dimanche contre de possibles attentats de ce groupe dans la capitale Abuja, dans un message diffusé aux Américains au Nigeria.

«À la suite des récentes attaques de Boko Haram (...) l'ambassade des É.-U. a reçu des informations selon lesquelles Boko Haram pourrait prévoir d'attaquer plusieurs lieux et hôtels d'Abuja», indique le message obtenu par l'AFP.

L'ambassade nomme le Nicon Luxury, le Sheraton Hotel et le Transcorp Hilton Hotel, des lieux prisés par les hommes politiques, les hommes d'affaires, les diplomates et les expatriés en général.

La menace d'attaques concerne la période de célébration de l'Aïd al-Adha, la fête du Sacrifice, mais l'ambassade précise ne pas disposer d'indications précises quant à leur possible survenue. L'Aïd était célébré dimanche au Nigeria, et lundi et mardi ont été décrétés jours fériés.

Le pape Benoît XVI a lancé un appel pour le Nigeria, dimanche, lors de la prière de l'Angelus, afin qu'il soit mis «fin à toute violence», en soulignant que la haine et les divisions ne peuvent pas résoudre les problèmes.

La fête de l'Aïd al-Adha endeuillée à Damaturu sous couvre-feu

Dimanche matin, des milliers de musulmans s'étaient réunis sur le principal lieu de prière de Damaturu à l'occasion de la grande fête musulmane, sous la surveillance de policiers.

«C'est une saison de deuil et de célébration en même temps», a déclaré un habitant, Aisami.

«Nous n'aurions jamais pu imaginer que de telles destructions et tueries puissent se dérouler dans notre ville», a déclaré un autre habitant, Ba'aji.

L'Aïd al-Adha n'a pas été une fête cette année pour Gudusu, quinquagénaire qui a perdu son jeune frère.

Après l'avoir enterré samedi, il priait pour lui, entouré d'amis devant sa maison dans le quartier Gwange et ne décolérait pas contre Boko Haram.

«J'ai toutes les raisons d'être en colère, ces gens ont détruit ma vie en tuant mon seul frère», dit-il.

Police et armée patrouillaient dans les rues de la ville sous couvre-feu de 18h à 6h du matin (12h à 0h, heure de Montréal). Des véhicules incendiés et des bâtiments endommagés étaient visibles.

Par la voie d'un porte-parole présumé, Boko Haram a revendiqué les attaques à Damaturu ainsi que celles survenues quelques heures plus tôt à Maiduguri, capitale de l'État voisin de Borno, où quatre kamikazes se sont fait sauter sans faire d'autre victime.

La secte, particulièrement active dans le nord-est, a mené de nombreuses attaques à la bombe et avec des armes. Elle a revendiqué l'attentat suicide contre le siège de l'ONU à Abuja le 26 août, qui a fait 24 morts.

Il semble que les explosions en série de vendredi soient son assaut le plus meurtrier.

En prévision de possibles troubles à l'occasion des festivités, la police nigériane avait été placée dès vendredi en «état d'alerte rouge» dans tout le pays.

Le nord du Nigeria - pays le plus peuplé d'Afrique avec plus de 160 millions d'habitants - est majoritairement musulman tandis que le sud est à dominante chrétienne. Le pays connaît régulièrement des épisodes de violence à caractère ethnique et religieux.

À Abuja, des policiers gardaient l'entrée de mosquées et d'églises, où les fidèles étaient parfois passés au détecteur de métaux à leur arrivée.

À Damaturu, le QG de la police a été détruit. Les assaillants ont attaqué des postes de police et des églises avant d'engager le combat avec les forces de sécurité.

Dans un quartier majoritairement chrétien, appelé Jérusalem, six églises, un poste et un atelier de la police ont été attaqués à la bombe.

«Toute la ville est traumatisée», a souligné un habitant, Edwin Silas.

Selon Ibrahim Farinloye, porte-parole de l'agence de secours nigériane, les attaques et les combats ont fait des victimes dans différentes couches de la société.

«Parmi les morts, selon lui, il y a à la fois des musulmans, des chrétiens, des civils, des soldats, des policiers et des personnels d'autres organisations paramilitaires».