Deux régions du sud de la Somalie, frappées par une gravissime sécheresse, ont été déclarées en état de famine par les Nations unies, qui parlent de la «plus grave crise alimentaire en Afrique» en 20 ans et appellent à la mobilisation pour éviter que la situation empire.

Selon l'ONU, jusqu'à 350 000 personnes souffrent de famine dans le sud de la région de Bakool et dans celle de Lower Shabelle, toutes deux contrôlées par les insurgés islamistes shebab. Le taux de malnutrition aiguë y dépasse les 30%, et sur une population de 10 000 personnes plus de six enfants de moins de cinq ans y meurent tous les jours.

«Si nous n'agissons pas maintenant, la famine va s'étendre à toutes les huit régions du sud de la Somalie dans les deux mois à venir, en raison de mauvaises récoltes et de l'apparition de maladies infectieuses,» a averti à Nairobi le coordinateur humanitaire des Nations unies pour la Somalie, Mark Bowden.

L'ONU estime que près de la moitié de la population somalienne, soit 3,7 millions de personnes, dont 2,8 millions vivant dans le sud, sont désormais en situation de crise.

Dans les deux régions frappées de famine, les taux de mortalité et de malnutrition sont comparables ou supérieurs aux précédentes crises qui ont frappé le Niger en 2005, l'Éthiopie en 2001 ou le Soudan en 1998, rappellent les Nations unies.

«Étant donné sa sévérité et son étendue géographique, il s'agit de la crise alimentaire la plus grave en Afrique depuis la famine en Somalie des années 1991/1992», précisent-elles même. Quelque 220 000 personnes avaient péri lors de cette catastrophe.

La situation est particulièrement précaire en Somalie, où à la catastrophe climatique s'ajoutent des conflits armés permanents. Mais plus de 10 millions de personnes sont touchées dans l'ensemble de la Corne de l'Afrique par la sécheresse actuelle, qui selon les Nations unies, serait aussi la pire en près de 60 ans.

Djibouti, l'Éthiopie, le Kenya, l'Ouganda sont affectés. Et les États-Unis ont exhorté l'Érythrée à révéler dans quelle mesure elle souffre aussi de la catastrophe climatique.

L'organisation de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), selon laquelle la famine a déjà fait des dizaines de milliers de morts en Somalie ces derniers mois, a demandé 120 millions de dollars supplémentaires pour faire face à la crise régionale.

La secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, a appelé à des mesures immédiates et d'autres, plus structurelles, pour «renforcer la capacité de la région à réagir à des crises futures».

En Somalie, estimant que la guerre civile incessante, et pas seulement la sécheresse, avait conduit à la famine, le président de la Banque Africaine de Développement, Donald Kaberuka, a jugé que toute solution devait inclure un accord de paix dans le pays.

La sécheresse et les conflits poussent aussi sur les routes des milliers de Somaliens, parfois prêts à entreprendre des semaines de marche pour rejoindre l'Éthiopie et le Kenya. Ils espèrent trouver dans ces pays voisins une aide humanitaire qui fait cruellement défaut chez eux.

Face à la gravité de la sécheresse, les insurgés islamistes shebab, affiliés à Al-Qaïda et qui contrôlent la plupart du sud et du centre de la Somalie, ont rappelé les travailleurs humanitaires étrangers qu'ils avaient poussés au départ en 2009.

Mercredi, le gouvernement somalien de transition s'est félicité de la déclaration de famine des Nations unies, espérant une recrudescence de l'aide internationale.

«Au moins, le monde reconnaît l'ampleur des souffrances qu'endurent les pauvres Somaliens», a estimé Abdulkadir Moalim Nur, ministre au bureau du président.

«La reconnaissance de la gravité (de la situation) dans ces régions peut aider à faire face à la pénurie de nourriture, avec l'envoi d'aide pour les situations de famine, notamment de médicaments des agences de l'ONU,» a-t-il estimé.