Près de dix millions de personnes sont menacées par la famine dans la corne de l'Afrique, en particulier au Kenya, a alerté lundi l'ONG Action contre la faim (ACF), qui réclame des mesures d'urgence.

Dans un communiqué, l'association assure qu'il s'agit là de la «crise alimentaire la plus grave du monde», due essentiellement à la «sécheresse prolongée» qui affecte la région depuis plusieurs années.

Au Kenya, environ trois millions de personnes «sont en situation d'insécurité alimentaire. Parmi eux, un nombre significatif de personnes ne se sont pas encore remises du manque de pluie des années précédentes», assure ACF.

Alors que l'aide humanitaire internationale seule ne suffit plus, ACF appelle à une réponse d'urgence du gouvernement kenyan et un renforcement massif de l'aide internationale afin d'enrayer la mortalité massive du bétail et la hausse excessive du prix des denrées alimentaires.

ACF, qui consacre un budget de 3,4 millions de dollars à la région et qui prévoit une augmentation supplémentaire de 3 millions en 2011, réclame de nouvelles mesures.

L'ONG suggère des augmentations de l'aide alimentaire, le déploiement de nouveaux programmes de nutrition, des aides préventives pour les enfants de moins de cinq ans, un accès d'urgence à des services vétérinaires pour le bétail et stabilisation des marchés pour contenir la hausse du prix des denrées alimentaires.

L'Agence de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) avait déjà lancé la semaine dernière un cri d'alarme au sujet de cette crise qui s'aggrave et qui menace tous les pays de la Corne de l'Afrique (Djibouti, Éthiopie, Kenya et Somalie).

Un camp sans réfugiés

L'organisation non gouvernementale Oxfam a réclamé lundi l'ouverture à Dadaab (est du Kenya) d'un camp supplémentaire, déjà parfaitement équipé, mais dans lequel les autorités kényanes refusent à ce jour de laisser entrer plusieurs dizaines de milliers de réfugiés somaliens.

«Des dizaines de milliers de réfugiés somaliens fuyant une crise alimentaire aiguë et les combats sont empêchés d'accéder à un nouveau camp qui demeure vide et non utilisé, alors que des familles vivent dans des conditions choquantes à quelques kilomètres de là», indique Oxfam dans un communiqué.

La crise humanitaire provoquée par la sécheresse et les combats en Somalie fait affluer quotidiennement 1400 personnes supplémentaires à Dadaab, le plus grand camp de réfugiés au monde, qui accueille aujourd'hui plus de 380 000 personnes alors qu'il a été construit en 1991 pour en héberger 90 000.

Le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés a obtenu en 2009 du Kenya l'autorisation d'édifier un camp supplémentaire, Ifo II, d'une capacité de 40 000 places, dont la construction a été achevée fin 2010, mais les autorités kényanes ont refusé à ce jour d'en ouvrir les portes.

Le Kenya a appelé en avril le HCR à installer en Somalie même des camps pour réfugiés, faisant valoir que ses capacités d'accueil étaient depuis longtemps dépassées, invoquant des questions de sécurité et soulignant que l'afflux de réfugiés somaliens créait de plus en plus de frictions avec les populations kényanes des environs de Dadaab, qui vivent également dans le plus grand dénuement.

Oxfam appelle la communauté internationale à aider davantage le Kenya à prendre en charge l'afflux croissant de réfugiés somaliens.

À défaut de pouvoir s'installer dans ce nouveau camp pourvu de capacités sanitaires, de système de distribution d'eau et de latrines, «60 000 nouveaux arrivants sont contraints de s'abriter dans des tentes rudimentaires hors des limites du camp, avec un accès réduit à une eau propre et à des toilettes», relève Oxfam.

«Il est tragique de voir des familles vulnérables prises au piège, obligées de subir des conditions de vie effrayantes, alors qu'il y a des installations fonctionnant parfaitement juste à côté», a affirmé Joos Van der Lest, responsable d'Oxfam au Kenya.

L'actrice américaine Kristin Davis, «ambassadrice» d'Oxfam rendue célèbre pour son rôle dans la série télévisée Sex and the City, a visité de son côté samedi le camp de Dadaab, a indiqué lundi Oxfam.

«J'ai été choquée de voir ce que les gens ici ont dû subir. J'ai parlé à des femmes qui ont marché pendant 20 jours à travers le désert, dont les enfants mouraient en chemin, pour arriver ici et se rendre compte qu'il y a à peine assez d'eau et de nourriture», a déclaré la comédienne, citée par Oxfam.

«Nous ne pouvons permettre ce genre de choses à notre époque», a poursuivi Kristin Davis, lançant un appel aux dons.

L'Éthiopie  a besoin de 400 millions

L'Éthiopie a annoncé lundi avoir besoin de près de 400 millions de dollars d'aide alimentaire pour lutter contre la pire sécheresse qui frappe la Corne de l'Afrique depuis soixante ans.

«On estime qu'un total de 4,5 millions de personnes vont avoir besoin d'une aide humanitaire pendant le reste de l'année, de juillet à décembre», a déclaré le ministre de l'Agriculture Mitiku Kassa à la presse.

Il a chiffré cette aide à 398 millions de dollars.

Le nombre de gens concernés est en hausse de 40% sur la précédente estimation publiée en avril.

Le problème en Éthiopie est aggravé par un afflux de réfugiés de Somalie, voulant échapper également à la guerre.