Le gouvernement égyptien a promis de recourir à tout l'arsenal législatif disponible pour éviter de nouvelles violences confessionnelles après les heurts meurtriers entre chrétiens et musulmans au Caire, un responsable religieux mettant en garde contre «une guerre civile».

La presse a accusé des «contre-révolutionnaires» et des «extrémistes» d'avoir fomenté ces troubles qui ont fait 12 morts et 232 blessés dans le quartier populaire d'Imbaba, selon un bilan officiel.

Les autorités ont aussi imputé ces violences à une «contre-révolution» orchestrée selon elles par des fidèles de l'ex-président Hosni Moubarak chassé du pouvoir le 11 février par une révolte populaire. L'armée assure depuis la direction du pays.

Sous le titre «Avant que la patrie ne brûle», le quotidien gouvernemental Al-Ahram écrit que le pays «fait face à des groupes anti-révolutionnaires qui tentent d'attiser le conflit confessionnel car ils sont convaincus que tout succès de la révolution menace leurs intérêts».

«L'extrémisme brûle la révolution», titre le quotidien indépendant al-Masri al-Yom.

Cité par le même journal, le mufti Ali Gomaa, l'une des plus hautes autorités musulmanes d'Égypte, a mis en garde contre «une éventuelle guerre civile en raison des tentatives des hors-la-loi de défier l'autorité de l'État».

Sur le réseau social Twitter, l'opposant Mohamed ElBaradei, prix Nobel de la paix, a appelé à une action rapide pour faire face à «l'extrémisme religieux et aux pratiques du Moyen-âge».

Après avoir assuré qu'il agirait d'une «main de fer» pour défendre la sécurité du pays, le ministre de la Justice, Abdel Aziz al-Guindi, a affirmé que le gouvernement allait «appliquer de manière immédiate et ferme les lois qui criminalisent les attaques contre les lieux et la liberté de culte», qui prévoient jusqu'à «la peine de mort».

Près de 200 personnes arrêtées après ces violences doivent être déférées devant des tribunaux militaires, alors qu'un couvre-feu a été imposé jusqu'à lundi à 9h00 dans le secteur, où de nombreux soldats et policiers anti-émeutes ont été déployés.

Depuis des mois, l'Égypte connaît une montée des tensions confessionnelles, alimentée par des polémiques autour de femmes coptes qui seraient maintenues cloîtrées par l'Eglise alors qu'elles souhaitent se convertir à l'islam.

Plusieurs manifestations à l'appel de salafistes (islamistes radicaux) avaient ainsi eu lieu pour réclamer «la libération» de Camilia Chehata et Wafa Constantine, deux épouses de prêtres selon eux séquestrées par l'Église. L'Église a démenti leur éventuelle conversion à l'islam.

Les principaux heurts à Imbaba se sont produits autour d'une église, attaquée par des musulmans estimant qu'une chrétienne voulant se convertir à l'islam y était enfermée. Une autre église a été incendiée.

Les salafistes ont nié toute implication dans les troubles d'Imbaba. Leur porte-parole, Abdel Moneim al-Chahhat, a affirmé au journal al-Akhbar que la pensée salafiste interdisait «toute provocation de conflits confessionnels».

Dimanche encore, quelque 400 musulmans et chrétiens rassemblés au Caire pour une marche pour l'unité ont été victimes de jets de pierres lancées par des «voyous», selon les services de sécurité.

Les Coptes, qui représentent 6 à 10% des quelque 80 millions d'Égyptiens, s'estiment discriminés et marginalisés dans une société en grande majorité musulmane sunnite. Ils ont été visés par plusieurs attentats, en particulier celui du Nouvel an contre une église à Alexandrie (21 morts).