«Le parti RCD de Ben Ali est dissous»: l'annonce mercredi a été accueillie mercredi par une explosion de joie dans le hall du palais de justice de Tunis où une foule compacte a aussitôt entonné l'hymne national.

«C'est une tumeur cancéreuse qui a été extraite, mais il faut désormais faire des séances de chimiothérapie», lance dans le brouhaha un avocat, Ayachi Hammami, qui s'est joint à des collègues en robe noire pour fêter l'évènement.

Le palais n'est plus qu'une immense clameur. «À bas le parti du RCD. À bas le bourreau du peuple», scandent des centaines de personnes qui célèbrent la mort légale du parti-Etat, près de deux mois après la fuite du président déchu Zine El Abidine Ben Ali sous la pression de la rue.

Le tribunal de première instance de Tunis a décidé la dissolution du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) à la demande des autorités de transition après l'avoir suspendu le 6 février. Son siège et ses permanences à Tunis et ailleurs dans le pays ont été depuis fermés.

«Vive la Tunisie libre. Le cauchemar est terminé», lance un jeune enroulé dans un drapeau national au milieu d'une foule hystérique: les uns se donnent l'accolade, d'autres en larmes communiquent la nouvelle par téléphone portable à des proches. Des femmes poussent des youyous.

La foule grossit rapidement, déborde dans le hall du palais de justice, avant de commencer à défiler dans une rue voisine. «Justice a été rendue: le RCD va à la poubelle !», répète la foule en choeur, saluée par des klaxons de conducteurs en liesse.

«Nous devons rester vigilants pour protéger les acquis de la révolution et barrer la route aux partisans du RCD qui peuvent ressurgir sous une autre appellation», ajoute Me Hammami.

«Les responsables du RCD doivent maintenant être jugés, tout comme beaucoup de Tunisiens ont été injustement emprisonnés, torturés et humiliés», déclare en pleurs Abdelhamid Al-Souli, un ouvrier de 47 ans à la barbe fournie.

«Ils faut qu'ils souffrent tout comme j'ai souffert pendant cinq ans et demi en prison», ajoute M. Souli, un membre d'Ennahda qui dit avoir été incarcéré entre 2003 et 2008 pour «appartenance à ce mouvement islamiste» interdit sous Ben Ali.

«C'est seulement maintenant que nous pouvons fêter la fin de Ben Ali», dit Amjad, venu de Bizerte spécialement pour le verdict de la justice. «Malgré sa chute, Ben Ali a continué à nous hanter à travers ce parti policier», note-t-il.

Et Mohamed Habib Jouini de renchérir: «Je suis comme un nouveau-né», dit ce quinquagénaire de Gaafour (nord-ouest), enveloppé dans un drapeau tunisien. «La dissolution du RCD équivaut à son enterrement.»

«Nous exprimons avec joie nos condoléances à la suite du décès du bourreau du peuple: le RCD, fils bâtard du président déchu. Sa dépouille pourrie va être enterrée dans la poubelle de l'Histoire», lit-on sur l'une des multiples affiches collées à la sauvette à l'entrée du palais de justice.

Aucune présence de partisans du RCD, qui revendiquait sous Ben Ali plus de 2 millions d'adhérents, n'a été remarquée.