«Bye Bye Khartoum», «le Sud est un pays»: plus de 2000 partisans de la sécession ont déambulé jeudi au rythme des tambours dans les rues de la capitale sudiste Juba à un mois jour pour jour du référendum d'indépendance du Sud-Soudan.

«Oui à l'indépendance, non à l'unité», ont scandé les manifestants qui se réunissent le 9 de chaque mois, depuis juillet, en préparation du référendum d'indépendance du 9 janvier, jour J pour des millions de Sud-Soudanais.

«C'est le dernier rendez-vous mensuel, la prochaine fois, le mois prochain, ce sera le moment de voter», se félicite Yan Kol, un étudiant venu célébré le compte à rebours référendaire avec des amis.

Musique tonitruante, t-shirts ornés de slogans sécessionnistes, les manifestants ont paradé dans les rues de Juba, avant de s'agglutiner au mausolée de John Garang, chef historique de la rébellion sudiste décédé dans un écrasement d'hélicoptère en 2005 peu après avoir signé la paix avec Khartoum.

Au mausolée, ils ont dansé en cercle au son percutant des tambours. «Les gens d'ici veulent l'indépendance, ils pensent que ce sera la fin de l'esclavagisme des noirs par les Arabes, qu'il y aura plus de développement et de services comme des hôpitaux et des écoles», clame Dimma Francis Joseph, un enseignant local.

Depuis la fin de la guerre civile Nord-Sud, le visage de Juba, la capitale sudiste, a radicalement changé. «Ici, en 2006, il n'y avait rien, c'était encore la brousse, mais maintenant il y a des immeubles, des investisseurs sont venus, les choses bougent, et cela va continuer après l'indépendance», pense Kelly Victor, un étudiant.

Mais le lifting de Juba masque l'extrême pauvreté du Sud-Soudan où la moitié de la population, soit environ quatre millions de personnes, a recours à l'aide alimentaire.

Les Sudistes se sont inscrits massivement sur les listes de scrutin pour le référendum. La commission électorale estime à environ trois millions le nombre de Sudistes inscrits au Sud-Soudan selon des données préliminaires. Au Nord-Soudan, la commission a annoncé jeudi l'inscription de 115 411 Sudistes.

Les analystes pronostiquent un triomphe aisé de l'option indépendantiste lors du scrutin, mais aucun sondage à grande échelle n'a été effectué au Sud-Soudan. Aussi, la capitale Juba, plus proche de l'Ouganda et du Kenya que de Khartoum, est considérée comme un fief indépendantiste.

L'accord de paix ayant mis fin en 2005 à 22 ans d'une guerre Nord-Sud prévoit en fait deux référendums le 9 janvier: l'un sur la sécession du Sud-Soudan et l'autre sur le rattachement de la région contestée d'Abyei, située à la lisière du Nord et du Sud-Soudan.

Or, tout le monde s'accorde pour dire que le référendum d'Abyei ne va pas avoir lieu à la date prévue, a indiqué cette semaine le département d'État qui suggéré une solution négociée entre les parties, plutôt qu'un report du scrutin.

La loi référendaire d'Abyei accorde le droit de vote à la tribu sudiste Dinka Ngok, mais pas aux Misseriya, des nomades arabes qui craignent de perdre l'accès à l'eau et au pâturage de cette région contestée si elle est rattachée au Sud-Soudan.

L'ex-président sud-africain Thabo Mbeki, aussi médiateur de la crise post-électorale en Côte d'Ivoire, était jeudi à Juba afin de trouver une solution à l'impasse d'Abyei.

Une solution acceptable doit obtenir l'assentiment des ex-rebelles sudistes du SPLM, du parti du président soudanais Omar el-Béchir, mais aussi des tribus locales qui habitent ou migrent à Abyei, estiment des analystes.

«Toute solution durable devra tenir compte des problèmes fondamentaux sur le terrain à Abyei, et avoir l'accord des chefs locaux des Misseriya et des Dinka Ngok», prévient Zach Vertin, de l'International Crisis Group.