L'activité reprenait timidement vendredi à Maputo où de longues files d'attente se formaient devant les magasins fermés pendant deux jours d'émeutes contre la vie chère qui ont fait au moins sept morts et 288 blessés.

Après deux jours de heurts, la nuit a été calme dans la capitale mozambicaine, a constaté le directeur des services d'urgence de l'hôpital central de Maputo, Antonio Assis da Costa.

«À partir de 21h00 (19h00 GMT jeudi), les choses se sont calmées», a déclaré M. da Costa à l'AFP, soulignant que les derniers patients blessés dans les affrontements entre manifestants et forces de l'ordre avaient été admis vers minuit.

«Maintenant (vendredi matin), je ne vois plus que des cas normaux, plus personne venant des émeutes», a-t-il ajouté.

L'annonce d'une hausse de 17% (bien 17%) du prix du pain la semaine prochaine avait embrasé mercredi les quartiers pauvres de Maputo, jetant des milliers de personnes dans les rues.

La journée de jeudi a été encore émaillée d'incidents. Entre 7h00 et 19h00 jeudi, les services d'urgence ont admis une quarantaine de patients, dont 32 blessés par des balles de caoutchouc, a précisé M. da Costa.

Au plus fort des émeutes mercredi, la police avait tiré à balles réelles sur la foule, selon les témoignages concordants de manifestants et personnels de santé, ce que démentent les forces de l'ordre.

10 morts et 443 blessés

Au total dix personnes ont été tuées et 443 blessées depuis mercredi, a annoncé vendredi le ministre mozambicain de la Santé, Ivo Garrido, révisant à la hausse un premier bilan.

«Le nombre total de morts depuis le premier jour des émeutes jusqu'à 07h00 ce matin (vendredi) est de dix», a indiqué le ministre, dans une déclaration lue par son porte-parole.

«Au cours des 24 heures écoulées entre 07h00 hier (jeudi) et 07h00 aujourd'hui (vendredi), trois décès directement liés aux émeutes ont été enregistrés, ce qui porte le total de décès à dix», a-t-il précisé.

Pendant cette période, a poursuivi le ministre, 149 blessés ont été admis dans les hôpitaux de Maputo et de sa banlieue, auxquels s'ajoutent six nouvelles admissions dans la matinée de vendredi, portant le total à 443 blessés.

Malgré un retour apparent à la normale, la colère était toujours perceptible vendredi matin. «Les gens n'ont pas d'argent pour acheter de la nourriture», s'emportait Elisa Aldino, 48 ans, interrogée par l'AFP alors qu'elle faisait la queue devant une boulangerie.

«Quand on n'a pas d'argent, on dort sans manger», ajoutait cette femme de ménage, venue du quartier pauvre de Maxaquene où les magasins n'ont pas rouvert.

Devant les stations-service du centre-ville, les automobilistes patientaient des heures pour faire le plein. Les grandes artères, bloquées depuis deux jours par des barricades de pneus enflammés, avaient été dégagées.

Les vendeurs de rue réinstallaient leurs étalages sur les trottoirs de la capitale, les bus avaient repris leur service. Mais les taxis collectifs, dont dépend la masse des plus pauvres pour se déplacer, étaient toujours absents et des patrouilles de police lourdement armées quadrillaient encore la ville.

«Je ne suis pas sûr que la vie ait repris normalement», soulignait un habitant de Xiquelene, un des bidonvilles de Maputo où les émeutes ont été les plus violentes, sur la télévision privée STV.

Selon le gouvernement, le mouvement a coûté 122 millions de meticals (3,33 millions de dollars) à l'économie du pays.

Le Mozambique, dévasté par la longue guerre civile (1976-1992) qui a suivi le conflit armé pour l'indépendance de l'ancienne colonie portugaise, connaît une misère alarmante. 65% de ses 20 millions d'habitants vivent sous le seuil de pauvreté.

Les prix ont flambé ces derniers mois en raison de la dépréciation de la devise nationale par rapport au rand sud-africain, qui a grimpé de 43% depuis le début de l'année. Le pays dépend étroitement des importations venues de son grand voisin.

En 2008 déjà, six personnes avaient été tuées dans des émeutes contre la hausse des prix des taxis collectifs.