Le président égyptien Hosni Moubarak, 82 ans, a multiplié cette semaine les apparitions publiques pour faire taire les rumeurs sur sa santé mais cette activité est loin de calmer les inquiétudes sur sa succession qui demeure une grande inconnue.

«Les activités du président Moubarak constituent la meilleure réponse aux rapports (sur sa santé) issus d'Israël et de certains cercles américains», a affirmé le porte-parole de la présidence égyptienne Souleimane Awad, cité jeudi par les quotidiens indépendants al-Masri al-Yom et Al-Chourouk.

Il faisait allusion à des informations publiées dans la presse israélienne et américaine sur des problèmes de santé dont souffrirait M. Moubarak, qui avait subi le 6 mars en Allemagne une ablation de la vésicule biliaire et le retrait d'un polype du duodénum.

«Les collaborateurs du président perdent haleine en le suivant, il est  infatigable», a ajouté M. Awad, rappelant que M. Moubarak a assisté ces derniers jours à plusieurs cérémonies, notamment à l'occasion des nouvelles promotions des académies militaires et de la police.

Si les activités de M. Moubarak apaisent effectivement les spéculations sur une détérioration subite de sa santé, elles ne sont cependant pas de nature à faire taire les interrogations sur l'avenir politique du pays le plus peuplé du monde arabe qui, au cours des trente dernières années, a été considéré par l'Occident comme un allié stable au Proche-Orient.

M. Moubarak, au pouvoir depuis 29 ans, et son fils Gamal (47 ans), présenté par certains cercles du pouvoir comme son successeur potentiel, refusent toujours de dévoiler leurs intentions.

Lors d'une visite en Italie en mai, M. Moubarak s'est contenté de répondre, à une question sur son possible successeur à la présidentielle de 2011, par un sourire et en pointant le doigt vers le ciel: «seul Allah le sait».

Au sein du régime, des divergences apparaissent.

Le premier ministre Ahmad Nazif a déclaré à la presse en mai qu'il souhaitait que M. Moubarak «soit capable de se représenter» estimant que «le système politique n'a donné naissance à aucune personnalité capable de diriger le pays à l'heure actuelle».

Ces propos, qui déniaient indirectement à Gamal Moubarak la capacité de prendre la relève, ont été désavoués par les proches de ce dernier.

«Au sein du PND (parti national démocrate), il y a plusieurs personnalités qui sont qualifiées pour la présidence, et pas seulement Gamal Moubarak», a affirmé Aley Eddine Hilal, un dirigeant de la nouvelle garde du parti fidèle au fils du président.

Pour Amr Choubaki, chercheur du centre d'Al-Ahram pour les études politiques, il n'y a que trois scénarios pour la succession: une personnalité issue de la hiérarchie militaire, Gamal Moubarak ou l'ex-chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) Mohamed ElBaradei.

Il opte pour le premier car, selon lui, «les chances d'une succession héréditaire s'amenuisent avec le manque de consensus au sein du régime sur le choix de Gamal».

«Les Égyptiens ne savent pas qui sera le prochain président, mais je pense que l'institution militaire et sécuritaire a déjà préparé un plan pour la passation du pouvoir et le nom du ministre de l'Aviation civile Ahmad Chafiq circule largement», affirme Emad Gad, expert du même centre.

Ex-chef de l'armée de l'air égyptienne de 1996 à 2002, le général Chafiq, 69 ans, occupe depuis son poste ministériel.

«Il est clair désormais que M. Moubarak ne sera pas candidat en 2011, et si son fils était l'unique candidat à sa succession, cela aurait été déjà annoncé officiellement. Quant à Baradei, il jouit de la sympathie de la société égyptienne mais ce n'est pas suffisant pour le porter au pouvoir», estime-t-il.