Au Zimbabwe, voir les 90 minutes d'un match de la Coupe du monde de soccer relève du miracle, tant les coupures d'électricité sont fréquentes. Une situation tellement insupportable qu'elle a poussé le chef du gouvernement à remercier son ministre de l'Énergie.

«Ils auraient pu nous épargner les délestages au moins ce mois-ci», fulmine Tafadzwa Goliati, qui s'est retrouvé plus d'une fois cramponné à son canapé devant un écran de télévision subitement devenu noir.

«À n'importe quel autre moment, on aurait accepté tranquillement. Mais la Coupe du monde n'a lieu que tous les quatre ans!», enrage ce résident d'un quartier populaire de Harare.

Les coupures de courant font partie du quotidien des Zimbabwéens depuis des années. Mais à l'approche du Mondial chez le voisin sud-africain, le ministre de l'Énergie, Elias Mudzuri, avait promis qu'il n'y aurait pas de délestages pendant les matches.

Peut-être a-t-il parlé trop vite ? Dès le match d'ouverture, la compagnie nationale Zesa a coupé l'alimentation en énergie de nombreux quartiers de la capitale. Immédiatement, la colère a grondé et mercredi, M. Mudzuri a été limogé.

En attendant que son remplaçant prenne ses marques, les accros du ballon rond affluent vers les fans parks où, contre un billet d'entrée de un dollar, ils sont assurés de suivre les matches en entier grâce à de puissants générateurs.

«À cause des coupures de courant, on est obligé d'aller dans les fans parks, même si le climat ne s'y prête pas», commente Itai Musengi, transi de froid en cet hiver austral plutôt rigoureux.

Le Zimbabwe a besoin de 2200 mégawatts d'électricité par mois mais n'en produit que 1100. Pour couvrir la différence, elle achète de l'électricité chez ses voisins... ou coupe le courant.

Pour éviter que cela ne se produise pendant le Mondial, un opérateur de téléphonie a même appelé ses clients à «éteindre tous leurs équipements électriques, sauf la télé, pendant les matches.» En vain.

Mais la situation ne fait pas que des malheureux.

Les vendeurs de générateurs sont les premiers à se frotter les mains. «Ne manquez aucune action!» proclame en lettres capitales une publicité dans un journal qui affiche le trophée du Mondial et une série d'appareils électriques.

Les bars équipés de leur propre générateur ne sont pas mécontents non plus. D'autres commerçants ont flairé l'aubaine: un magasin de bricolage vient de se transformer en fan park non officiel pour le reste de la compétition.