Goodluck Jonathan, devenu jeudi président du Nigeria après le décès d'Umaru Yar'Adua, est un scientifique issu du sud pétrolifère entré en politique il y a seulement une dizaine d'années et qui a largement bénéficié d'un concours de circonstances.

Son accession à la tête du pays le plus peuplé d'Afrique s'est faite à la faveur de la maladie qui a entrainé l'hospitalisation de son prédecesseur en novembre pour des problèmes cardiaques puis provoqué sa mort mercredi.

Vice-président de Yar'Adua, M. Jonathan avait déjà accepté en février, à la demande du parlement et pour mettre fin à de longs mois d'incertitude politique, de remplacer le chef de l'État.

Après la mort de ce dernier, il a prêté serment jeudi en qualité de président, dans l'attente d'élections dans environ un an.

Originaire du delta du Niger, une région troublée et aux populations pauvres, M. Jonathan, 52 ans, est titulaire d'un doctorat de zoologie. Une belle ascension sociale pour cet homme né dans une famille modeste qui fabriquait des pirogues, dans l'État de Bayelsa.

Après avoir enseigné puis travaillé pour la protection de l'environnement au sein d'une agence gouvernementale, il se lance en politique en 1998.

Mais son parcours semble avoir été façonné par des évènements sur lesquels il avait peu de prise et les équilibres régionaux et religieux de la politique nigériane.

«Il a été propulsé, on ne sait pas s'il a des ambitions politiques», notait récemment Marc-Antoine Pérouse de Montclos, chercheur à l'Institut de recherche pour le développement (IRD) et spécialiste du Nigeria.

Ainsi il s'était retrouvé contre toute attente sur le «ticket» présidentiel avec Umaru Yar'Adua pour les élections d'avril 2007, alors qu'un baron du parti au pouvoir, le Parti démocratique du peuple (PDP), tenait la corde.

Huit ans avant, en 1999, année du retour de la démocratie, il avait élu comme candidat du PDP gouverneur adjoint de Bayelsa, un État clé de la fédération car producteur de pétrole.

Il est réélu en 2004 avec le gouverneur Diepreye Alamieyeseigha mais, en décembre 2005, ce dernier est destitué après avoir été accusé de blanchiment d'argent.

Goodluck Jonathan devient de facto gouverneur et dirige les affaires de Bayelsa jusqu'en 2007.

Le PDP, qui domine la scène politique, désigne Umaru Yar'Adua, un gouverneur du nord majoritairement musulman, pour la présidentielle d'avril.

Pour répondre à une exigence de répartition équilibrée du pouvoir entre le nord et le sud, essentiellement chrétien, le parti choisit Goodluck Jonathan, chrétien, pour la vice-présidence, estimant qu'il était «le plus propre» des gouverneurs des États du delta, réputés très corrompus.

Le tandem remporte sans surprise le scrutin, largement entaché d'irrégularités selon quasiment tous les observateurs électoraux.

En tant que vice-président, Goodluck Jonathan, toujours coiffé d'un Stetson et généralement vêtu d'ensembles traditionnels de sa région, a travaillé sans faire de vagues mais sans impressionner non plus.

Certains le critiquent pour son manque de charisme et de poigne, d'autres soulignent qu'il n'a pas, au moins, été publiquement éclaboussé par des scandales financiers.

Lors lors de son premier conseil des ministres en février en tant que président par interim, il avait remanié le cabinet et muté le ministre de la Justice qui s'était opposé au remplacement de M. Yar'Adua.

Le 1er mai, il avait déclaré que ses priorités pour le reste de son mandat étaient l'approvisionnement régulier du pays en électricité, la sécurité dans le delta du Niger en proie à des rebellions et des élections libres et honnêtes.