Aux lendemains d'élections controversées, le Soudan voit se profiler l'échéance du référendum d'indépendance du Sud-Soudan, région déchirée pendant de longues années par la guerre, qui pourrait aboutir à la division du plus grand pays d'Afrique.

Le président soudanais Omar el-Béchir a été reconduit au pouvoir sans surprise lundi lors de l'annonce des résultats des premières élections multipartites en près d'un quart de siècle au Soudan et a donné aussitôt donné le ton des mois à venir.

«Notre prochain combat sera le combat pour l'unité du Soudan», a déclaré tard lundi soir M. Béchir, lors d'un rassemblement devant ses partisans du Parti du congrès national (NCP) à Khartoum.

Et dans une allocution solennelle à la télévision, il s'est engagé à organiser à la date prévue le référendum d'indépendance du Sud-Soudan. Pour cette vaste région sous-développée sise sur d'importants gisements pétroliers, les élections sont considérées comme une étape sur le chemin de l'indépendance.

L'accord de paix global ayant mis fin en 2005 à 22 ans de guerre civile, à l'origine de deux millions de morts et quatre millions de déplacés, entre le Nord et le Sud du Soudan prévoyait la tenue d'élections nationales, puis d'un référendum sur la sécession.

Une fois l'étape électorale franchie, les Sud-Soudanais ont maintenant les yeux rivés sur la ligne d'arrivée: le référendum.

Or M. Béchir, malgré un score national de 68% à la présidentielle, a récolté moins de 10% des voix au Sud-Soudan, devancé de loin par Yasser Arman, candidat des ex-rebelles sudistes du Mouvement populaire de libération du Soudan (SPLM) qui s'était retiré de la course mais dont le nom figurait toujours sur les bulletins de vote.

«Béchir et son équipe devront travailler beaucoup afin de convaincre les Sudistes de choisir l'unité. Je pense qu'ils vont faire des concessions. Ils pourraient proposer plus d'autonomie au Sud-Soudan afin d'éviter la séparation du pays», explique à l'AFP Haydar Ibrahim, analyste politique soudanais.

Une commission référendaire nationale a été promise pour encadrer le scrutin. L'inscription des électeurs du Sud-Soudan et des Sudistes vivant au Nord doit commencer dans les prochains mois au cours desquels le Nord et le Sud doivent régler des questions clés comme la délimitation de leur frontière.

«Je crains que le NCP tente au cours des prochains mois de retarder la mise en oeuvre de l'accord de paix et du référendum sur la base de questions techniques. C'est très dangereux!», a prévenu Yasser Arman lors d'une rencontre avec quelques journalistes étrangers.

Un report du référendum prévu début janvier pourrait pousser le Sud-Soudan à une déclaration unilatérale d'indépendance, ce qui poserait le problème de la reconnaissance internationale de cet éventuel nouveau pays de neuf millions d'habitants à la superficie équivalente à celle de la France.

Autre souci, la «qualité» du référendum. Les observateurs européens et américains ont jugé que les élections soudanaises n'étaient pas conformes aux normes internationales, ce qui n'empêche pas les gouvernements étrangers de continuer à travailler avec Khartoum et ce, même si M. Béchir est sous mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI).

«Même si on reconnaît des problèmes aux élections, la priorité demeure de maintenir des relations pour assurer la bonne tenue du référendum. Tout le monde veut éviter une nouvelle guerre civile entre le Nord et le Sud. Mais si le référendum n'est pas libre et équitable, cela posera des problèmes», résume un diplomate occidental sous le couvert d'anonymat.