Il y a un an, le président Robert Mugabe se résignait à partager un pouvoir qu'il exerçait seul depuis l'indépendance en 1980. Le Zimbabwe va mieux aujourd'hui, mais les accrochages persistants avec l'ancienne opposition menacent le redressement entamé.

Lorsque le principal opposant au régime, Morgan Tsvangirai, a prêté serment comme premier ministre le 11 février 2009, le pays autrefois prospère était plongé dans un marasme économique et politique sans précédent.

Des centaines de partisans de M. Tsvangirai avaient été tués dans les violences qui ont suivi la défaite du régime aux élections de mars 2008.

Plus de la moitié de la population dépendait de l'aide alimentaire. Une épidémie de choléra, causée par la faillite du système d'épuration de l'eau et aux égout non entretenus, venait d'emporter plus de 4 000 personnes. Médecins et enseignants fuyaient le pays en masse. Le chômage atteignait 94%.

Sous médiation sud-africaine, les deux camps ont fini par accepter un mariage forcé. Le président Mugabe, 85 ans, conservait le contrôle de l'appareil sécuritaire tandis que le nouveau premier ministre prenait les cordons de la bourse.

Dès janvier, la monnaie nationale vidée de toute valeur par des années d'une folle hyperinflation avait été abandonnée. Avec la dollarisation de l'économie, les donateurs internationaux sont prudemment revenus.

Les magasins vides il y a un an sont aujourd'hui remplis. Des services publics vitaux comme les écoles ou les hôpitaux ont repris une relative activité. Après une décennie de contraction, la croissance redémarre, à 4,7% en 2009.

Mais «il n'y a pas eu de miracle et le pays manque encore de liquidités», note le professeur Anton Hawkins, de l'Université du Zimbabwe. «Il faudrait un environnement politique plus sûr pour avancer plus vite.»

Le gouvernement d'union nationale reste en effet l'otage des dissensions entre l'Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (Zanu-PF) du président Mugabe et le Mouvement pour le changement démocratique (MDC) du premier ministre.

Dès le premier jour, le climat a été empoisonné par l'arrestation pour «sabotage» du trésorier du MDC, Roy Bennett, pourtant vice-ministre désigné de l'Agriculture. Le MDC déplore la nomination unilatérale de hauts responsables par le président, la poursuite des violences et tortures contre ses partisans et la partialité des médias d'État.

«Notre plus grand problème reste l'écart entre les gestes et la parole», souligne le porte-parole du parti, Nelson Chamisa. «Ils promettent de coopérer mais en fait ils agissent seuls».

La Zanu-PF renvoie la balle au MDC, l'accusant de ne pas obtenir la levée des sanctions occidentales, rendues responsables de tous les maux de l'économie bien qu'elles soient limitées au président et à ses proches.

«Le Zimbabwe demeure au bord du gouffre», estime la coalition associative Crise au Zimbabwe, qui envisage un retour «à l'ère des pénuries alimentaires, de l'inflation galopante, de la violence rampante».

De fait, les investisseurs rechignent à s'engager dans le pays. Selon les Nations unies, 1,9 million de Zimbabwéens, soit 15% de la population, auront besoin d'aide alimentaire en 2010.

Et vendredi, les fonctionnaires lassés d'être sous-payés ont lancé une grève illimitée.

Les deux camps restent optimistes. «Tous les indicateurs montrent que le processus est irréversible», a déclaré M. Tsvangirai à l'AFP en marge du Forum économique de Davos.