Après 22 ans au pouvoir, le président tunisien Zine El Abidine Ben Ali est assuré d'emporter les élections dimanche et d'entamer un nouveau mandat, avec l'ambition, malgré la crise économique, de porter la Tunisie au rang des pays avancés d'ici 2014.

Face à trois concurrents, le président sortant brigue un 5e et théoriquement dernier mandat, la Constitution amendée en 2002 autorisant des mandats successifs et limitant à 75 ans l'âge du président.

Ben Ali, 73 ans, a succédé au premier président de la Tunisie indépendante, Habib Bourguiba, qu'il avait destitué pour «sénilité» en 1987.

En 2004, il avait été reconduit par 94,4% des voix et son parti avait obtenu une majorité écrasante au parlement, résultats décriés par ses détracteurs incrédules.

Son parti, le Rassemblement Constitutionnel démocratique (RCD, au pouvoir depuis l'indépendance) devrait également conserver la majorité des 214 sièges de la Chambre des députés aux législatives, se déroulant également dimanche.

Le résultat des scrutins ne fait aucun doute aux yeux des observateurs et les trois rivaux de Ben Ali partent «sans illusions» et «sans enjeu électoral» pour la 3e élection présidentielle pluraliste.

La campagne électorale (11-23 octobre) a révélé le fossé existant entre la logistique modeste de l'opposition et la machine de guerre électorale du RCD fort de 2,7 millions d'adhérents et profondément ancré dans le pays.

M. Ben Ali bénéficie de l'appui des centrales patronale et syndicale. Ses portraits prédominent, il est le candidat déclaré de trois des huit partis d'opposition.

Le RCD mobilise par milliers. Ses couleurs, rouge et blanc, et celle violet de M. Ben Ali, drapent les villes et villages, ses ministres sillonnent le pays, avec en point d'orgue, des apparitions médiatisées de son épouse, Leila, au premier plan de la campagne.

Peu connus, les portraits de ses rivaux apparaissent sur les espaces réservés à l'affichage urbain et dans les médias, leur audience se limitant, selon des témoins, à quelques centaines de personnes lors des meetings de campagne.

Sortant des rangs, Ahmed Brahim, se plaint d'entraves après la censure de son manifeste et la saisie de l'organe de son parti de gauche, Ettajdid (Renouveau, 3 sièges).

Cet universitaire à la retraite, 63 ans, se pose «en vrai concurrent» et refuse de jouer au «figurant». Il propose des réformes audacieuses et réclame l'alternance au pouvoir.

Deux autres opposants, Ahmed Nejib Chebbi et Mustapha Ben Jaafar, se sont retrouvés hors course, pour «non conformité à la loi».

Face à M. Ben Ali, deux autres postulants proches du pouvoir: Mohamed Bouchiha, 61 ans, du Parti de l'unité populaire (PUP, 11 députés) et Ahmed Inoubli, 51 ans de l'Union démocratique unioniste (UDU, nationaliste, 7 députés).

Les détracteurs du régime qualifient la consultation de «mascarade» et l'accusent de «tailler des lois sur mesure» pour une «opposition d'allégeance» et un «pluralisme de façade» dans un paysage «verrouillé».

«Renforcer le processus démocratique» est un leitmotiv de M. Bouhiha, déjà candidat en 2004, son parti misant plutôt sur plus de sièges au parlement.

Un Observatoire national dirigé par l'ancien bâtonnier Abdewaheb Béhi surveillera les élections à la demande du président sortant, qui s'est engagé pour un scrutin «transparent» et «régulier».

Fort de succès économiques, Ben Ali souhaite inscrire son pays au rang des pays avancés et s'engage à réduire le chômage (14%) qui risque de mettre en péril les acquis sociaux dont se prévaut le régime.