Son élection confirmée par la Cour constitutionnelle gabonaise lundi soir, Ali Bongo, fils du président Omar Bongo Ondimba décédé en juin après 41 ans au pouvoir, devrait être investi avant la fin de semaine alors que l'opposition dénonce «une mascarade».

Après cinq semaines de feuilleton, la Cour a finalement validé l'élection malgré «quelques insuffisances» et rejeté ou déclaré irrecevables les 11 recours en annulation du scrutin déposés par 9 candidats et une citoyenne. Selon la Cour, M. Bongo est élu avec 41,79% des voix. Ce chiffre, issu du recomptage des voix effectué fin septembre par la Cour, est légèrement différent de celui (41,73%) qui avait été annoncé le 4 septembre et avait provoqué un fort mouvement de contestation. Lors d'émeutes à Port-Gentil, la capitale pétrolière, 5 personnes avaient été tuées, selon les autorités, au moins 5 d'après l'opposition.

Le score des deux principaux rivaux d'Ali Bongo, qui s'estiment chacun vainqueur du scrutin, n'est que légèrement modifié mais il entraîne un bouleversement de poids: l'opposant Pierre Mamboundou passe avec 25,66% des voix devant l'ex-ministre de l'Intérieur André Mba Obame, crédité de 25,33% des suffrages. Cet ancien proche d'Ali Bongo avait été classé deuxième du scrutin (25,88%) dans le résultat du 4 septembre, devant M. Mamboundou (25,22%).

Avant même la lecture de l'arrêt de la Cour, M. Mba Obame, auteur de l'un des 11 recours, a annoncé qu'il entamait une grève de la faim, dénonçant «un coup d'État électoral» et «une dérive dictatoriale».

Une «petite clique s'arc-boute sur ses intérêts en prenant tout le pays en otage», a-t-il déclaré. «La mascarade continue».

«Le président Bongo nous avait laissé un pays qui avait des institutions crédibles, mais l'égoïsme, la mesquinerie (...), la soif effrénée de pouvoir des uns et des autres ont en quelques mois ruiné le travail accompli», a-t-il ajouté.

«La Cour, c'est la tour de Pise: elle penche toujours du même côté. Nous ne sommes pas surpris», a déclaré Yvette Ngwevilo Rekangalt, une des 8 autres candidats qui avaient déposé un requête. 

Comme les autres requérants, elle avait refusé d'envoyer un huissier pour assister au recomptage des voix, estimant qu'il fallait aussi un représentant par candidat, ce qui avait été refusé par la Cour.

«Les décisions de la Cour sont irrévocables mais la loi ne doit pas être au service d'un pouvoir (...) Si la loi est au service du pouvoir, le peuple reprendra un jour son pouvoir», a-t-elle conclu.

Le Secrétaire général du parti d'Ali Bongo, le Parti démocratique gabonais (PDG), Faustin Boukoubi a pour sa part dit «éprouver un sentiment de pleine satisfaction».

«Si Ali Bongo Ondimba avait voulu faire un coup de force, on n'aurait pas attendu quatre mois. Le droit et la loi ont prévalu. (...) Le Parti démocratique gabonais a prouvé qu'il était un parti démocratique», selon lui.

«Tous les Gabonais ont un président qui va s'atteler à tous les problèmes des Gabonais et faire du Gabon un pays émergent», a promis M. Boukoubi.

Si le verdict de la Cour n'a entraîné aucun incident, la tâche s'annonce cependant compliquée pour Ali Bongo, selon plusieurs observateurs. «Personne n'est prêt à négocier avec lui», a confié un responsable de l'Union du peuple gabonais (UPG), le parti de M. Mamboundou. Ali Bongo, qui appartient à une petite ethnie, «aura contre lui les Fang (ethnie de M. Mba Obame, relativement majoritaire dans le pays -entre 30 et 40%), les Punu (ethnie de M. Mamboundou) et les Nzébis (ethnie de Zacharie Myboto, un autre candidat battu). Le pays va être ingouvernable», a-t-il estimé.