La libération d'Abdelbaset Al-Megrahi, le Libyen détenu au Royaume-Uni pour l'attentat de Lockerbie, annoncée comme imminente par les médias mais non confirmée, servirait de cadeau d'anniversaire pour les 40 ans au pouvoir de Mouammar Kadhafi, selon des experts.

Abdelbaset Ali Mohamed Al-Megrahi avait été condamné en 2001 à la prison à vie, assortie d'une peine de sûreté de 27 ans, pour l'explosion au-dessus de Lockerbie (Ecosse) d'un vol de la PanAm qui avait fait 270 victimes en 1988.

Selon les médias britanniques, le Libyen devrait être remis en liberté en raison de son cancer de la prostate en phase terminale. Il pourrait rentrer dans son pays à temps pour le début du ramadan, qui commence le 21 août en Libye, mais surtout avant les cérémonies qui marqueront le 1er septembre les 40 ans de la révolution qui a porté au pouvoir le colonel Kadhafi. Pour les analystes, il ne s'agit pas d'une coïncidence.

«Le fait que tout cela va se mettre en place avant le 1er septembre n'est pas une coïncidence du côté libyen», estime Molly Tarhuni, experte au centre de réflexion Chatham House, à Londres.

«Etre capable de se tourner vers le monde après quarante ans et de dire: ''je suis toujours là'', c'est certain que cela va revêtir une très grande importance pour lui et le régime», ajoute-t-elle à l'AFP.

Le colonel Kadhafi pourrait ainsi arriver tout auréolé de gloire quand il se rendra en septembre à New York pour participer à l'assemblée générale des Nations unies, une présence qui n'a pas encore été confirmée mais qui a été récemment évoquée par le numéro un libyen.

La prochaine remise en liberté de Megrahi, qui n'a toujours pas été confirmée de source officielle, représenterait également un tournant historique dans les relations entre Londres et Tripoli. Suspendues en 1984, elles avaient repris en 1999 après la remise par la Libye de Megrahi. Les relations s'étaient encore davantage réchauffées, quand Tripoli avait renoncé aux armes de destruction massive en 2003 et accepté de payer 270 millions de dollars d'indémnités aux familles des victimes de l'attentat de Lockerbie, ouvrant la voie à la levée de l'embargo international de la Libye.

 Ce réchauffement est motivé par des questions de sécurité, la Libye pouvant servir d'allié dans la «guerre contre le terrorisme», mais également par les importantes réserves d'or noir et de gaz que posséde le pays.

BP a signé un accord en 2007 avec la Libye en vue de l'exploration de gaz mais a «des difficultés à faire venir des équipements lourds dans le pays», explique Bassam Fattouh, expert à l'Oxford Institute for Energy Studies. Si Megrahi est libéré, «BP pourra s'attendre à obtenir le feu vert», ajoute M. Fattouh au quotidien The Times de samedi.

«Des rumeurs suggèrent que, parmi les pressions libyennes (en vue de la libération de Megrahi, ndlr), figuraient des menaces d'ingérence dans des intérêts commerciaux, dont ceux de BP», ajoute Oliver Miles, ancien ambassadeur du Royaume-Uni en Libye, cité la semaine dernière dans le Guardian.

Selon une source libyenne proche du dossier, qui a requis l'anonymat, «la Libye n'a pas la mémoire courte et elle ne pardonnera jamais à la Grande-Bretagne si Megrahi n'est pas libéré. Ceci aurait des repercussions immédiates notamment sur les relations éconnomiques».

Megrahi est considéré par les autorités et le peuple libyen comme «un héros qui s'est sacrifié pour lever l'embargo imposé à son pays». «Lui permettre de passer le reste de ses jours dans son pays est la moindre des choses que la Libye peut offrir à cet homme qui a été la victime d'une injustice internationale», souligne-t-on de source officielle libyenne.