L'envoyé spécial de l'administration Obama pour le Soudan s'est prononcé jeudi pour que Washington retire Khartoum de sa liste des États soutenant le terrorisme, estimant que les sanctions qui en découlent freinent le développement économique du pays.

«Nos services de renseignement n'ont jamais présenté aucune preuve tangible indiquant que le Soudan est un État soutenant le terrorisme», a dit Scott Gration aux membres de la Commission du Sénat américain des Affaires étrangères. «C'est une décision politique», a-t-il ajouté.

Selon le site internet du département d'État américain, le Soudan a fait son apparition sur cette liste en août 1993. C'est le quatrième pays à en faire partie, aux côtés de Cuba, l'Iran et la Syrie.

Selon M. Gration, un général de l'armée de l'Air à la retraite, «les conséquences des sanctions qui découlent de (l'inscription sur la liste des État soutenant le terrorisme) nous empêchent d'encourager le développement du pays tel que nous devrions le faire».

Il a ajouté que les sanctions américaines ne faisaient «en réalité que freiner la mise en chantier» d'infrastructures dans le sud du pays. Il a cité le cas du matériel de construction de routes ou l'équipement informatique destiné aux écoles, deux catégories de biens que les entreprises américaines ne peuvent exporter légalement du fait des sanctions.

En réponse aux questions de deux sénateurs républicains, M. Gration a affirmé qu'il n'existait «aucune preuve» que le Soudan encourageait et soutenait le terrorisme. A contrario, selon lui, le gouvernement d'Omar el-Béchir aurait même prêté main forte aux États-Unis dans leur lutte contre le terrorisme.

Une appréciation «exagérée» pour le sénateur démocrate Russel Feingold qui s'est prononcé pour une politique justement plus musclée envers le Soudan qui, selon lui, «n'a pas les mains aussi propres que cela».

Depuis 2003, la région soudanaise du Darfour est le théâtre d'une guerre civile qui a fait 300 000 morts selon l'ONU.

Les ONG -- dont les relations avec Khartoum sont tendues pour une bonne partie -- ont réagi de façon mitigée à l'audition de M. Gration.

«Mais qu'a fait Khartoum pour mériter (la levée des sanctions)?», s'est demandé John Norris, un responsable de Enough Project. «Je ne pense pas que le comportement (du Soudan) appelle une telle récompense», a-t-il martelé.

De son côté, Sam Bell qui dirige le Genocide Intervention Network s'est inquiété de ce que Scott Gration «a dit qu'il fallait que Washington lève ses sanctions pour que Khartoum change d'attitude. Mais des représentants du Sud Soudan nous disent 'Ne levez pas les sanctions avant que Khartoum ne change d'attitude'. Il y a là un énorme hiatus.»

Mercredi, Susan Rice, l'ambassadrice américaine aux Nations unies avait expliqué que les États-Unis «continuaient de presser Khartoum de faciliter l'envoi de biens et de denrées de première nécessité (au Darfour) et d'améliorer sa coopération avec la Minuad», la force de maintien de la paix ONU-Union africaine dans la région.