L'Union européenne a officiellement relancé jeudi ses relations politiques avec le Zimbabwe, après sept ans d'interruption, mais elle demande encore la fin des violations des droits de l'Homme dans le pays avant de dégeler son aide au développement.

«La rencontre d'aujourd'hui construit les fondations pour une relation nouvelle entre l'UE et le Zimbabwe», s'est réjoui le commissaire européen au Développement Louis Michel à l'issue de la première réunion UE-Zimbabwe depuis l'imposition de sanctions européennes en 2002.«Votre gouvernement offre une opportunité politique unique de voir le Zimbabwe réengager le dialogue avec la communauté des donateurs internationaux», a-t-il dit au premier ministre Morgan Tsvangirai, qui effectue une tournée mondiale afin de récolter des fonds pour son pays en ruines.

«Mais pour donner le coup d'envoi à ce réengagement, nous voulons des progrès clairs sur certains points de friction dans le cadre de l'accord politique (de partage du pouvoir), par exemple dans les domaines des médias et des droits de l'Homme», a-t-il ajouté.

Conformément à cet accord de partage du pouvoir conclu après la victoire historique de son parti d'opposition, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), aux législatives de mars 2008, M. Tsvangirai est devenu premier ministre en février tandis que son rival Robert Mugabe, au pouvoir depuis 1980, a conservé la présidence.

Depuis février, des progrès importants ont été faits, a reconnu l'UE.

Mais «un nombre important de défis doivent encore être relevés», a souligné le ministre suédois des Affaires étrangères Carl Bildt, dont le pays prendra la présidence de l'UE le 1er juillet et qui remplaçait à la conférence de presse la présidence tchèque occupée par le sommet européen.

«La violence politique doit cesser. Il est inquiétant que les membres d'Amnesty, les militants des droits de l'Homme continuent d'être harcelés. Il doit y avoir plus de travail sur l'État de droit», a-t-il dit.

Il a aussi demandé que les forces de sécurité soient «fermement sous le contrôle du gouvernement d'union» et évoqué le problème de la «liberté des médias».

Amnesty international a d'ailleurs dénoncé jeudi les violations des droits de l'Homme «graves et persistantes» qui se poursuivent au Zimbabwe.

M. Tsvangirai a assuré que les Zimbabwéens se fixeraient eux-mêmes certains «objectifs» qui seraient «en accord avec les normes d'une société démocratique».

Si le gouvernement parvient bien à des progrès dans ces domaines, l'UE «espère» que son aide au développement pourra «reprendre bientôt», a assuré Louis Michel.

«Avec un peu de chance», l'UE pourra aller vers «la levée ou l'atténuation des sanctions» imposées en 2002 contre le régime de Mugabe et renforcées au fil des ans, a ajouté M. Bildt.

Ces sanctions incluent un gel de l'aide européenne, en dehors de l'aide humanitaire et sociale directe à la population, ainsi que l'interdiction de présence sur le sol européen pour 203 Zimbabwéens, dont Robert Mugabe et sa femme Grace, et 40 entreprises.

Morgan Tsvangirai a assuré qu'il n'était «pas déçu». «Les engagements sont là. Ils sont mesurés. Ils sont échelonnés, et je pense que c'est un bon soutien progressif que nous cherchons», a-t-il ajouté.

Après avoir visité notamment Washington, Stockholm, Berlin et être encore attendu à Londres, le premier ministre ne rentre pas non plus les mains vides, ayant notamment obtenu 73 millions de dollars de Barack Obama.

«J'ai perdu le compte», a-t-il noté en souriant.

La Commission européenne a de son côté espéré jeudi pouvoir débloquer 29 millions d'euros, en plus de 90 millions prévus pour 2009.