Le président somalien Sharif Cheikh Ahmed a accusé mercredi, pour la première fois, l'Erythrée d'armer les insurgés islamistes qui ont promis de le renverser, lors d'une conférence de presse à Mogadiscio.

«Nous savons de manière certaine que la majorité des armes aux mains des insurgés viennent d'Erythrée. Nous savons que des officiers érythréens viennent ici et apportent de l'argent en liquide. L'Erythrée est très impliquée ici», a-t-il affirmé.Vendredi, l'Union africaine (UA) avait demandé au Conseil de sécurité de l'ONU de prendre des sanctions contre le gouvernement d'Asmara, dénonçant son soutien aux insurgés islamistes somaliens.

Le 7 mai, les insurgés ont lancé à Mogadiscio une offensive sans précédent, menée par la milice «Hezb al-Islamiya» du chef islamiste radical cheikh Hassan Dahir Aweys, et les islamistes radicaux des shebab, pour renverser le président Sharif, un islamiste modéré élu en janvier.

Selon le gouvernement ces combats ont fait plus de 200 morts, en grande majorité des civils.

Selon M. Ahmed, «cheikh Aweys a mentionné le fait qu'ils (les Erythréens) le soutenaient».

«Le but de l'Erythrée est de maintenir l'Afrique de l'Est dans la tourmente. A partir du moment où il y a une guerre et des tensions entre l'Ethiopie et l'Erythrée, l'Erythrée a besoin d'un endroit où les groupes d'opposition éthiopiens peuvent être entraînés. Ils visent la destruction de l'Ethiopie et ils veulent la déstabiliser à partir de la Somalie», a ajouté M. Ahmed.

Une guerre frontalière a opposé l'Ethiopie et l'Erythrée de 1998 à 2000, faisant environ 80.000 morts. Depuis, la tension est grande entre ces deux voisins de la Corne de l'Afrique.

Interrogé sur l'opportunité d'une nouvelle intervention de l'Ethiopie en Somalie, le président a répondu par la négative.

«Absolument pas, nous voulons que notre pays reste indépendant. Nous n'accepterons aucune intervention. Si quelqu'un (un pays) vient pour nous aider, nous devons d'abord nous assurer de ses intentions», a-t-il expliqué.

Selon des témoins interrogés par l'AFP, des troupes éthiopiennes en véhicules blindés et lourdement armées ont de nouveau pénétré le 19 mai en Somalie, quatre mois après leur retrait complet du pays.

L'Ethiopie a depuis démenti sa présence en Somalie et assuré qu'elle n'interviendrait pas «unilatéralement» avec ses troupes pour soutenir le gouvernement somalien.

«Notre ministre de la Sécurité nationale s'est rendu à Addis Abeba et a discuté de cette question avec les Ethiopiens. Ils se sont accordés sur le fait que les troupes éthiopiennes resteraient de leur côté de la frontière», a assuré le président somalien.

Fin 2006-début 2007, l'Ethiopie avait mis en déroute, aux côtés du gouvernement de transition, les islamistes qui contrôlaient depuis six mois la majeure partie du centre et du sud du pays, dont Mogadiscio. Le corps expéditionnaire éthiopien s'est retiré de Somalie au début de l'année.