Le président sortant du Malawi, Bingu wa Mutharika, qui se targue d'avoir éliminé la faim dans son pays, a été largement élu pour un second mandat et investi à Blantyre vendredi, quelques heures seulement après l'annonce des résultats contestés par l'opposition.

M. Mutharika, 75 ans, a recueilli 66% des suffrages contre 31% pour son principal adversaire John Tembo lors de l'élection présidentielle de mardi, selon les résultats de la commission électorale publiés dans la nuit de jeudi vendredi et portant sur 93% des bureaux de vote.

Quelques heures plus tard, le président réélu a été investi à la mi-journée dans un stade de Blantyre, alors même que les résultats complets n'avaient pas été encore publiés.

Son avance est cependant telle qu'il ne peut pas être rattrapé par M. Tembo. Ce dernier, ancien bras droit du dictateur Kamuzu Banda (1964-1994), a rejeté les résultats.

Sa formation, le Parti du Congrès du Malawi (MCP), «va enquêter sur les irrégularités pour savoir si il y a eu fraude». «Les résultats sont très inhabituels, extraordinaires», a déclaré vendredi à l'AFP le secrétaire général du MCP Chris Daza.

Le parti avait déjà envoyé mercredi une lettre à la commission électorale rejetant les premiers résultats.

En 2004, l'annonce officielle de la victoire de M. Mutharika avait provoqué des émeutes dans des quartiers populaires de Blantyre, mais vendredi à la mi-journée aucun incident n'était signalé. Au contraire, des centaines de Malawites ont célébré la victoire de leur candidat, en dansant dans les rues de la capitale économique.

Craignant toutefois une répétition du scénario de 2004, la police a été placée «en état d'alerte». «Nous avons des instructions très claires d'écraser toute forme de violence ou de protestation», a déclaré à l'AFP un haut responsable de la police sous couvert d'anonymat.

L'ancien président Bakili Muluzi, qui n'a pas eu le droit de se présenter pour un troisième mandat et s'est rallié à l'opposant Tembo, a de son côté accepté les résultats et appelé au calme.

«Nous devons rester unis et pacifiques. Je ne veux pas voir de violences causées par certaines mécontents», a-t-il déclaré à La Presse.

Quelque 6 millions de Malawites étaient appelés mardi à élire leur président et leurs députés lors des quatrièmes élections multipartites dans cet ancien protectorat britannique.

Le processus électoral s'est déroulé dans le calme, mais les observateurs internationaux ont noté de nombreuses «imperfections», dont le «parti pris» des médias d'État en faveur du pouvoir sortant.

La Commission électorale n'a pas encore publié les résultats définitifs des législatives, mais selon les premières données, la formation de M. Mutharika, le Parti progressiste démocrate (DPP), est en tête.

Reste à savoir si le DPP emportera une majorité au Parlement. Lors de son premier mandat, M. Mutharika a dû diriger le pays avec un gouvernement minoritaire, ce qui l'a empêché de mener librement ses politiques économiques, notamment dans le domaine agricole.

Pour remporter la présidentielle, M. Mutharika a d'ailleurs mis en avant la réussite de son programme de subvention de semences et de fertilisants.

Après la famine qui, en 2005, a frappé cinq des 13 millions de Malawites, il a distribué graines et engrais, plongeant le budget national dans le rouge mais assurant trois récoltes qui ont permis de nourrir ce petit pays d'Afrique australe, frappé par la pauvreté et très touché par le sida.